C’est une petite victoire pour les Etats-Unis et les concepteurs de puces américains : l’usine de production de semi-conducteurs que le taïwanais TSMC construit en Arizona sera bien une usine de pointe. Lorsque les premières tranches de silicium (les wafers) sortiront pour la première fois de ses complexes lignes de production, elles ne seront pas gravées en 5 nm comme prévu initialement, mais en 4 nm. Un « bonus » technologique qui permettra aux Etats-Unis de bénéficier sur leur sol de la seule unité de production de pointe hors d’Asie. En effet, seuls TSMC (Taïwan) et Samsung (Corée du Sud) sont pour l’heure capables d’une telle prouesse.
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Dans la course à la finesse de production, les besoins des géants américains des semi-conducteurs sont devenus primordiaux du fait des tensions commerciales et géopolitiques avec la Chine. Des entreprises comme Intel, AMD ou Nvidia sont privées d’export de certaines de leurs puces vers l’Empire du Milieu. Et, potentiellement plus grave (voire catastrophique), en cas d’invasion de Taïwan, les Etats-Unis n’auraient plus beaucoup d’options autres que la Corée du Sud pour produire des super puces – mais la gravure de Samsung est de moindre qualité que celle de TSMC.
L’entreprise qui pourrait bénéficier le plus de ce site de production local est évidemment Apple. Un acteur qui est, autant avec ses iPhone que les iPad ou ses Mac, un énorme consommateur de puces. L’essentiel de son portfolio actuel de puces A et M est actuellement gravé en 5 nm – plus exactement 5 nm N4. Se pose donc la question de l’usage qu’Apple fera de cette usine quand elle ouvrira courant 2024 alors que ses puces sont pressenties êtres gravés en 3 nm à ce moment-là. La question du déploiement du 3 nm à Taïwan sera donc centrale pour juger de sa pertinence pour Apple.
Cela reste cependant une source d’approvisionnement intéressante autant pour Apple que pour AMD, Nvidia, Qualcomm et même Intel – qui va utiliser un node TSMC pour le GPU de sa future génération de processeurs Core de 14e génération, « Meteor lake ». Grâce aux 20 000 wafers de cette Megafab (à Taïwan, TSMC dispose de Gigafab capable de produire jusqu’à 100 000 wafers par mois), les industriels américains ont ainsi un accès « souverain » (ou presque) à des processeurs de pointe sur leur territoire. Un filet de sécurité en cas d’agression militaire de la Chine contre Taïwan. Un scénario catastrophe qui priverait tous ces acteurs de la quasi-totalité de leurs puces – Intel excepté.
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Cette mégafab marque aussi le retour des Etats-Unis dans le domaine de la production de pointe – en attendant qu’Intel industrialise son procédé « Intel 4 » qui fait appel à la gravure EUV. En plus de faire grimper la part de marché « made in USA » en berne depuis deux décennies, elle va aussi renforcer à la fois les chaînes d’approvisionnement ainsi que le pool de talents locaux. De quoi faire plaisir au gouvernement du président Biden… ainsi qu’aux Européens qui pourront, eux-aussi, profiter d’une source non asiatique. En attendant l’ouverture en 2027 de l’usine allemande d’Intel à Magdebourg.
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Source : Bloomberg
Et. Autant de raisons de lâcher taiwan.