Une taxe injuste, un calcul « erroné », un fardeau « disproportionné » : Meta, le groupe de Mark Zuckerberg, et TikTok, le réseau social chinois, viennent d’annoncer, à quelques heures d’intervalle, qu’ils contestaient le paiement d’une nouvelle taxe prévue par le Digital Services Act (DSA), le règlement européen sur les services numériques. Selon Politico, qui a révélé le premier cette information les 7 (pour Meta) et 8 février (pour TikTok), ces deux sociétés ont formé des recours devant la cour de justice de l’Union européenne du Luxembourg.
Le DSA contraint les réseaux sociaux et les plateformes à de nouvelles obligations, dont des devoirs de modération qui seront contrôlés par des équipes de la Commission européenne. Concrètement, l’UE vérifie que les réseaux sociaux agissent assez rapidement contre les contenus considérés comme illégaux ou nuisibles, comme les images violentes ou les messages destinés à désinformer ou à manipuler l’opinion. Pour être à même de réaliser cette tâche, la Commission européenne a expliqué qu’elle avait besoin, pour 2024, de 45 millions d’euros. Il est prévu que cette somme soit financée par une sorte de taxe de surveillance, collectée auprès des principales concernées, les plus grandes plateformes – ce que l’Union européenne (UE) appelle « VLOP », pour « Very large platform ».
La taxe est payée en majorité par les plateformes qui ont le plus d’utilisateurs
Pour calculer le montant que doit payer chacune des vingt plateformes désignées comme VLOP, l’UE a prévu une méthode que contestent Meta et TikTok. Le DSA précise que la nouvelle mission des régulateurs européens est financée en majorité par les entreprises qui ont le plus d’utilisateurs, sauf si ces dernières ne sont pas rentables. La taxe, collectée chaque année, est plafonnée à 0,05 % des bénéfices d’une entreprise. Et si on ne sait pas exactement combien doivent payer les plus gros contributeurs, on sait que Meta a payé 11 millions d’euros à la fin de l’année dernière, explique Politico.
Bloomberg, en octobre dernier, soulignait déjà que Meta et Alphabet (la maison mère de Google et de YouTube) devraient payer la majorité de cette taxe. À elles deux, les deux géantes du numérique ont vraisemblablement payé les trois quarts de la facture annuelle de 45,2 millions d’euros – soit 11 millions d’euros pour Meta, et 22,1 millions pour Alphabet. X, pourtant l’objet d’une enquête officielle de la Commission européenne pour ne pas avoir empêché « la diffusion de contenus illégaux dans le contexte des attaques terroristes du Hamas contre Israël », ne devrait rien payer. Notamment parce que l’entreprise serait déficitaire, ou n’enregistrerait que très peu de bénéfices, suggère The Verge, ce jeudi 8 février. On ne connaît pas le montant payé par TikTok, mais s’il conteste la méthode de calcul de paiement, c’est que la somme doit être loin d’être négligeable.
Un système injuste, selon Meta
Car même si 0,05 % des bénéfices peut sembler peu, la facture peut vite monter pour des multinationales. Pour le groupe de Mark Zuckerberg, le fait que des entreprises déficitaires ne soient pas tenues de payer quoi que ce soit, alors qu’elles nécessitent un contrôle accru de l’UE, doit être revu. « Nous sommes en désaccord avec la méthodologie utilisée pour calculer ces frais », explique Ben Walters, porte-parole de la politique des communications EMEA de Meta, à nos confrères de The Verge. « Actuellement, les entreprises qui enregistrent une perte n’ont pas à payer, même si elles ont une grande base d’utilisateurs ou représentent un fardeau réglementaire plus important, ce qui signifie que certaines entreprises ne paient rien, laissant les autres payer une part disproportionnée du total », ajoute-t-il.
Pour TikTok, la méthode de calcul de cette taxe, prévue par le DSA, est « erronée », rapporte Politico, ce jeudi 8 février. Dans un communiqué dont Bloomberg se fait l’écho ce jour, le géant chinois explique faire appel « pour un certain nombre de raisons, y compris l’utilisation d’estimations erronées de tiers concernant notre nombre d’utilisateurs actifs mensuels comme base de calcul du montant total » de la taxe.
Interrogé par l’AFP le 7 février, un porte-parole de la Commission européenne a répondu que les entreprises avaient le droit de faire appel. Mais il a rappelé que la méthodologie utilisée pour le calcul de la taxe était bien « solide », et que l’exécutif européen était prêt à défendre sa position devant la justice. Le responsable a ajouté que toutes les entreprises avaient bien payé cette taxe avant la date limite du 31 décembre dernier.
Ce n’est pas la première fois que des entreprises contestent le DSA. Amazon et Zalando ont attaqué leur désignation en tant que VLOP l’été dernier.
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Le DSA est entrée en vigueur en août dernier pour les vingt très grandes plateformes, les VLOP. Le 17 février prochain, c’est au tour de toutes les autres entreprises de s’y conformer. En cas de non-respect du texte, la sanction est salée : les amendes peuvent aller jusqu’à 6 % de leur chiffre d’affaires annuel. En cas de violation répétée, les plateformes peuvent être exclues du marché de l’Union européenne.
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Source : Politico