C’est l’histoire d’une guerre qui se termine en amour fou, avec un bébé à la clé. Le géant des processeurs Intel a en effet annoncé son premier processeur Core de 8e génération intégrant une puce graphique Radeon produite par son ennemi juré, AMD. Un petit séisme dans le milieu animé, depuis toujours, par l’inimité entre les deux entreprises. Une révolution se matérialisera sur le marché au début de l’année 2018 sous la forme d’une puce tout-en-un. Elle devrait permettre de produire des PC portables à la fois très compacts et très puissants.
Un EMIB pour les gouverner tous
Basés sur la 8e génération de Core H, les futurs processeurs nés de cette union utiliseront un nouveau format ultra compact : si la puce résultante est plus grosse qu’un processeur classique, c’est qu’elle intègre à la fois le processeur (CPU), le processeur graphique (GPU) et sa mémoire dédiée.
Au final, la puce tout-en-un finale occupera bien moins d’espace que les composants séparés. Une prouesse rendue possible par une nouvelle technologie Intel appelée Embedded Multi-Die Interconnect Bridge (EMIB). Sous ce nom, qui n’est pas sans rappeler un être unicellulaire, se cache une prouesse technique : la capacité à concevoir une puce composée de sous-éléments gravés à différentes tailles et provenant éventuellement de fournisseurs différents. Intel est donc capable d’assembler un CPU gravé en 10 nm, un processeur graphique en 20 nm, de la mémoire en 14 nm, etc. Le tout dans un design ultra compact. En termes d’ingénierie, c’est impressionnant.
Pour Intel, le bénéfice de cette collaboration est de pouvoir proposer des processeurs dotés d’une partie graphique bien plus performante (comprendre « de joueur ») que ses circuits graphiques maison. De quoi concevoir des PC gaming encore plus fin et de venir couper l’herbe sous le pied de Nvidia avec ses designs MaxQ.
Quant à la compétition entre Intel et AMD sur les processeurs mobiles – AMD vient tout juste de lancer ses Ryzen Mobile – selon AMD cité par le Wall Street Journal, ces puces ciblent les joueurs sérieux « et jouent donc dans des marchés complémentaires ».
Outre la compacité et la puissance de ce nouveau type de puce, la technologie d’interconnexion EMIB va aussi permettre à Intel de produire des puces « à la carte », en intégrant plus ou moins de cœurs, telle ou telle puce graphique – pourquoi pas un cœur GeForce de Nvidia un de ces jours ? –, plus ou moins de mémoire graphique, etc. Même si, avouons-le, Nvidia semble être une des cibles de cette alliance.
Et si AMD est l’ennemi de toujours, il est assez vraisemblable que c’est pourtant avec lui que la coopération a été la plus facile pour Intel. Car dans le domaine du développement des parties graphiques custom, AMD est le roi du genre.
Processeur à la carte : l’expérience console d’AMD
Prenez une Wii. Ou une Xbox 360. Ou une Wii U, une PS4 (Pro ou pas) ou une Xbox One X. Qu’ont toutes ces consoles en commun ? Un circuit graphique développé par AMD. Si Nvidia domine outrageusement le marché des cartes graphiques de PC, son rival AMD profite d’un quasi-monopole dans le domaine de la console de salon, une force qui lui a permis de tenir financièrement dans ses (longues) années de vaches maigres. Et de pouvoir continuer à développer ses gammes de processeurs de bureau (Ryzen, Threadripper) et de puces graphiques pour PC (Radeon Vega).
Si AMD a réussi dans ce domaine, c’est non seulement pour son savoir-faire – mais ça Nvidia en a aussi – mais sans aucun doute aussi pour ses capacités à travailler main dans la main avec différentes équipes à la production de puces très différentes. Les Wii ont des composants peu puissants mais pas chers, les puces des PS4 Pro et autre Xbox One des parties graphiques plus conséquentes. Et parfois, il vaut mieux faire bien un travail en harmonie avec les autres plutôt que d’être le meilleur mais tout seul dans son coin.
Une puce qui pourrait séduire Apple
Il est une marque qui pourrait s’emparer au plus vite de ces puces Intel/AMD : Apple. Comme le rappelle Minimachines, le papa des MacBook est très « attaché au duo Intel/AMD », un attachement qui se vérifie dans le futur iMac Pro qui intègrera à la fois de l’Intel Xeon et une puce Radeon Vega. Rappelons que les relations entre Apple et Nvidia n’ont pas toujours été au beau fixe, notamment à cause de la surchauffe excessive de certaines puces GeForce qui avait causé un rappel de masse de MacBook. Et puis, Apple est un grand amateur des puces « custom » qui lui permettent autant de concevoir des designs différents que d’éviter la comparaison directe des performances face aux PC Windows.
Si la puce Intel/AMD est suffisamment performante, elle pourrait même permettre à l’architecture x86 d’Intel de continuer à équiper les ordinateurs à la pomme… en attendant qu’Apple trouve le moyen d’évincer ces puces au profit de ses processeurs ARM ?
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