C’est une information juridique un peu technique mais bonne à savoir. Les pages de sites Web stockées sur Archive.org sont à utiliser avec précaution si vous voulez vous en servir pour prouver un acte de contrefaçon sur Internet. Deux sociétés de négoce et de distribution de bijoux en pierres précieuses synthétiques, Moissanite et Laval, l’ont appris à leurs dépens en juillet dernier.
L’histoire est racontée sur Legalis.net, qui publie comme à son habitude le jugement. En 2005, la société Laval commercialise les bijoux de Moissanite sur M6boutique.com, une plate-forme éditée par la société Home Shopping Service. Sur le site, les produits sont accompagnés d’une formule marketing, « La pierre du futur pour la femme d’aujourd’hui ». Jusque-là, aucun problème.
Puis, fin 2005, Laval arrête la distribution sur M6boutique. Mais début 2007, elle constate qu’une autre société, vendant des bijoux du même type, utilise la même accroche publicitaire. Or, c’est une marque déposée. Après une lettre de mise en demeure adressée à Home Shopping Service, en février 2007, Moissanite et Laval attaquent l’éditeur devant le tribunal de grande instance de Créteil.
Motifs : contrefaçon de marque et concurrence déloyale. Elles demandent l’arrêt de l’utilisation de la phrase publicitaire ainsi que 20 000 euros chacune au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral et matériel et 100 000 euros en réparation du préjudice commercial. Toutes ces demandes ayant été rejetées en première instance, les plaignants ont fait appel. Ils ont perdu à nouveau le 2 juillet 2010.
Pas d’autorité légale
Le tribunal a estimé que les éléments fournis par les deux plaignants pour prouver la contrefaçon ne sont pas valables. En première instance, elles avaient présenté une capture d’écran du site M6 Boutique montrant les pierres mises en vente avec la phrase « La pierre du futur pour la femme d’aujourd’hui ».
Une capture faite en 2007. Soit après que la société Laval a arrêté de vendre sur le site. Or, selon le tribunal, cette capture a été réalisée « dans des conditions ignorées et sans l’intervention d’un huissier de justice ou d’un tiers assermenté, sans précision sur le matériel, l’adresse IP, le mode de navigation et le réseau de connexion utilisé ». Autrement dit : cet élément n’est pas fiable.
Du coup, en appel, les sociétés Moissanite (devenue la société Saval) et Laval produisent trois nouvelles captures d’écran récupérées sur Archive.org devant huissier. Encore une fois, le tribunal les rejette. Il estime entre autre qu’Archive.org est « un service d’archivage exploité par un tiers à la procédure, qui est une personne privée sans autorité légale, dont les conditions de fonctionnement sont ignorées » et que « cet outil de recherche n’est pas conçu pour une utilisation légale. »
Il n’y a donc aucune garantie que personne ne soit intervenu pour modifier la page à un moment où à un autre avant le constat d’huissier. Résultat : il est impossible de prouver la contrefaçon sur cette base.
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