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Pourquoi Samsung pourrait fermer sa division photo

Les pertes de la division, les rumeurs persistantes et l’absence de communication de la firme font penser que le géant coréen pourrait fermer sa division photo. Crédible ?

Les rumeurs vont bon train depuis des mois, et une dépêche du site d’actualités économiques coréen Newstomato cité par DIYPhotography semble enfoncer le clou : Samsung songerait à fermer sa division photo. Techniquement, c’est un comble quand on sait que le constructeur coréen lançait en fin d’année dernière l’un des meilleurs hybrides jamais conçus, le NX1, que nous avons testé sur 01net.com. Cette réussite technologique cache cependant une réalité économique moins reluisante : la division photo accumule les pertes. Et Samsung n’a pour habitude de laisser les situations pourrir.

Arrêts des développements, effectifs sabrés

Newstomato cite « l’absence de toute activité marketing depuis 6 mois » de la division photo et « un arrêt des développements depuis le mois de juillet dernier ». En crise depuis des années, le marché de la photo a subit le raz-de-marée des smartphones et les volumes se sont effondrés. Or Samsung est un industriel qui a besoin de ces volumes. En cette fin 2015 le marché se régénère doucement sur le haut de gamme, mais les volumes sont faibles et les places sont chères…

En France, la division photo a perdu son directeur marketing l’an dernier, à la suite d’une décision de réorganisation émanant de Corée du Sud. Depuis, elle est gérée par un collaborateur qui doit gérer la photo en plus de plusieurs autres catégories de produits. Or, la photo est un marché complexe : soit on s’y met à fond, soit on arrête. C’est d’autant plus vrai pour Samsung que la marque est beaucoup moins légitime que les historiques type Canon, Nikon, Fuji, etc. Sans gros efforts, son avenir était compromis. Et les rumeurs vont bien dans le sens d’un abandon.

Réussite technique, échec du marketing coréen

Les ingénieurs de Samsung ont su développer un écosystème et prendre le leadership technologique dans certains domaines.

Les maigres parts de marché des appareils photo Samsung ne sont pas à mettre sur le dos des ingénieurs, bien au contraire. Face à une horde japonaise – Canon, Casio, Fujifilm, Nikon, Olympus et Panasonic sont tous issus du pays du Soleil-Levant – les coréens ont réussi à être pionniers dans les hybrides avec le NX10 sorti en 2010, ont su développer les premiers appareils connectés comme le Galaxy Camera et ont même réussi à prendre des leaderships technologiques avec les NX1 et NX500 qui se sont placés parmi les meilleurs boîtiers de leurs catégories. Samsung a développé des optiques de qualité comme le 16-50 f/2-2.8 et son dernier capteur APS-C 28 Mpix est excellent.

Le vrai fautif dans l’histoire pourrait bien être le marketing : des sorties d’appareils suivies de silence radio, pas de feuille de route de lancement d’optiques (capitales pour établir un écosystème), des baisses de prix brutales qui ont fâché certains distributeurs, des appareils exotiques (NX Mini, NX Camera, etc.), pas de programme d’ambassadeur, des pubs rares et inconstantes, etc. Le tout couronné d’un pilotage sud-coréen étouffant, qui laissait peu de marges de manœuvre aux filiales alors que les spécificités entre les pays sont énormes en matière de culture photo.

Pas d’état d’âme

Samsung a déjà fermé des divisions ou des branches, de manière définitive ou par zones géographiques. Fin 2014, Samsung se retirait du marché des PC Windows grand-public et pro en Europe, conservant une activité en Asie et pour certains marché business. Elle a aussi fermé ses services multimédia en France dont Music Hub, son service de chat ChatOn, son magasin londonien, etc. Le sud-coréen est dans le rouge et doit se réorganiser.

L’incertitude : la fierté coréenne

Tant qu’un communiqué ne l’officialise pas, la division photo existe encore chez Samsung. Si du point de vue du business la division photo est coûteuse, plusieurs raisons pourraient conduire Samsung à rester dans le jeu : la fierté de ne pas s’incliner face aux japonais, une remise à plat de la stratégie ou encore un intérêt en r&d. Chez Sigma par exemple, le développement des appareils photo (lire notre test du DP2 Quattro) ne rapporte pas d’argent, mais cela profite au développement et à la qualité des optiques comme le confiait le PD-G de l’entreprise à DPReview lors d’une interview récente (lien en anglais). Si Samsung y trouve toujours son compte en termes de brevets ou d’intégration de technologies (dans la division téléphonie par exemple), elle pourrait conserver sa branche photo.

Rien ne se perd, rien ne se créer

Selon un financier interrogé par Newstomato, si la marque en venait à arrêter la photo, les technologies acquises par la division pourraient être « intégrées à des appareils médicaux ». Ce scénario est tout à fait plausible pour deux raisons : primo la division photo découle directement d’une division d’image militaire de Samsung, la marque sait donc recycler ses technologies. Deuxio, plusieurs témoignages que nous avons pu recueillir en off par le passé auprès de représentants coréens comme français confirment que Samsung pense à l’après, à l’ère post semi-conducteur. La raison étant que la concurrence acharnée de la part des groupes chinois ronge ses parts de marché dans tous les domaines – smartphones, mais aussi réfrigérateurs, lave-linge, TV, etc. Si le conglomérat ne veut pas mourir étouffé entre les champions de l’empire du milieu, il va lui falloir changer de stratégie.

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Adrian BRANCO