Selon
Loïc Le Meur, directeur général Europe de Six-Apart*, blogs et wikis enrichiront la mémoire de l’entreprise.Les blogs sont devenus un phénomène de mode. Peuvent-ils séduire les entreprises en mal de stratégie de gestion des connaissances ?
Loïc Le Meur : Pourquoi pas ? Ces pages personnelles ou ces fils d’actualités et de chroniques en ligne se sont répandus comme un virus dans l’entreprise. Les blogs représentent un changement profond d’Internet. En
tout cas, aussi important que la messagerie. Ce mouvement, récent en France, est cependant réellement amorcé dans les entreprises. Des initiatives internes de création de blogs se sont développées dans divers types de sociétés. Elles émanent non
seulement des directions, mais aussi des salariés, des chefs de projet, des directions de la communication. Et, parfois même, du département de la gestion des connaissances ou de la division Intranet. C’est un moyen de diffuser rapidement de
l’information. Mais aussi de créer une mémoire de ce que fait l’entreprise, et que l’ensemble des salariés partagera en ligne. Avez-vous des exemples concrets ?
Oui. Le projet d’un blog à la BBC à Londres, lancé à l’initiative du responsable de la division knowledge management pour améliorer la communication interne. Leur blog est devenu le ‘ rendez-vous machine à
café ‘.
Le blog est, par essence, communautaire et génère des conversations, des contacts avec son réseau. Tous les salariés concernés par le même centre d’intérêt formeront ainsi une communauté d’experts. Le blog donne accès à l’information
de l’entreprise. Chez Capgemini, il a servi à créer le nouveau logo de l’entreprise. Certains sont recrutés grâce à leur blog, comme chez Microsoft. Parfois, la sous-utilisation des outils de gestion des connaissances de l’entreprise a poussé les
salariés à créer ces pages personnelles en ligne. Elles seront peut-être très désorganisées au départ. Mais les blogueurs finiront par trier, puis classer l’ensemble des informations.Quels principaux bénéfices l’entreprise peut-elle en retirer ?
Je parlerai d’abord de la circulation, mais aussi de la démocratisation de l’information. Tout le monde est à égalité, et peut se connecter au blog pour lire et écrire des articles ou ‘ posts ‘, dans le jargon.
Il faut savoir que la communauté des blogueurs s’auto-organise et s’autorégule. Enfin, le blog peut contribuer sensiblement à réduire les coûts. Surtout quand on sait à combien s’élèvent certains projets de gestion des connaissances
?” parfois plus de 200 000 euros. A comparer aux 5 000 euros que coûtent certains blogs professionnels. Chez Leclerc ou Microsoft, les directions ont bien compris que les blogs bouleversent la relation avec les clients.
Ils s’inspirent donc des retours de ces derniers.Certains outils de gestion des connaissances ne sont-ils pas apparus trop rigides ?
Les témoignages de plusieurs grandes entreprises montrent que les utilisateurs sont attirés par la philosophie d’autorégulation des blogs. Le blog est perçu comme un moyen simple de communication, libre. Mais également comme un
faire-valoir, et aussi un bon moyen de se faire connaître.
A l’inverse, les outils de gestion des connaissances sont trop organisés, voire rigides. Pire : certaines entreprises ont ainsi casé les salariés dans des boîtes. La dérive possible de l’utilisation d’un outil de gestion des
connaissances est de penser à l’avance le contenu, sans pour autant déterminer ou savoir quel type d’information sera intégré dans la base de connaissances de l’entreprise. On ne peut deviner les futures compétences ou les événements imprévisibles.
Sans être expert de la gestion des connaissances, j’ai le sentiment que les systèmes mis en ?”uvre sont souvent très coûteux, difficiles à installer et à lancer, mal conçus, et, parfois même, sous-utilisés.Les wikis peuvent-ils représenter un nouvel atout pour les entreprises ?
Oui, si le blog s’intéresse à l’individu et à l’actualité. Le wiki, ou site web dynamique, est conçu autour d’une démarche et d’un travail collaboratif. Il sera certainement plus adapté à l’archivage d’informations organisées d’une
entreprise. L’exemple le plus frappant en est celui de Wikipedia. Un projet d’encyclopédie gratuite en ligne, écrite coopérativement, et modifiée, à volonté, par tout visiteur en ligne. Associé à la mémoire de l’entreprise, le wiki pourrait
constituer un très bon outil complémentaire des offres actuelles de gestion et de partage des connaissances. Il aidera alors à capter, conserver et partager un capital jusqu’ici sous-exploité : les savoir-faire des collaborateurs, les retours
d’expérience et la connaissance implicite.* Six-Apart, éditeur américain d’outils de publication de weblogs
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