Et revoilà Strava le mouchard ! Trois journalistes de Mediapart se sont appuyés sur les profils publics de la célèbre application/réseau social sportif pour récolter des données sur plus de mille profils appartenant à priori à des militaires français. Pire, près de deux cents de ces profils appartiendraient à des membres des forces spéciales. Comme le soulignent Justine Brabant, Sébastien Bourdon et Antoine Schirer qui ont mené l’enquête, si la loi punit effectivement quiconque de révéler des informations sur nos forces spéciales, les législateurs n’avaient peut-être jamais songé que la fuite proviendrait des militaires eux-mêmes !
Si les journalistes ont recoupé les informations avec d’autres sources, comme Facebook, le fait est que ce sont surtout les tracés de Strava, notamment dans des zones d’opération, qui permettent de récolter le plus d’informations quant aux trajets, aux contours des bases, etc. Et ce n’est pas la première fois que les données compilées par le service/réseau social sportif dévoilent des informations pouvant porter préjudice aux forces armées alliées. Déjà début 2018, la carte mondiale des trajets de tous les utilisateurs (heatmap) en libre accès permettait de découvrir des bases américaines plus ou moins secrètes : un simple survol au-dessus de la Syrie ou de l’Irak et on devinait les contours de ces outposts rien qu’en suivant les trajets de footing des soldats.
Si l’étau se resserre autour des smartphones – les forces spéciales françaises n’y ont déjà pas droit en opération et même les militaires du rang US pourraient en être privés en déploiement – il faudra aussi que les commandements fassent attention aux montres connectées. Une fois synchronisées à un smartphone au retour de mission, elles laisseront elles aussi fuiter les informations, comme cela fut le cas, en 2018 encore, dans le cas des montres Polar.
Nos confrères n’ont évidemment pas joué aux délateurs ni procuré des informations secrètes aux potentiels terroristes : d’une part toutes les données publiées ont été anonymisées et ont été récoltées à partir de sources publiques et librement accessibles. D’autre part, ils ont prévenu le ministère des Armées deux semaines à l’avance et transmis toutes les informations des plus de mille profils concernés afin que les soldats puissent effacer leurs traces en amont de la publication de l’article. Preuve s’il en est qu’une partie de la presse a bien appris à protéger les militaires. Mais face au Net, il serait bien que ceux-ci fassent de même !
Source : Mediapart (accès payant)
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