On s’y attendait, c’est désormais chose faite. Par la voix de Mark Zuckerberg, Facebook a officialisé l’arrivée des bots sur Messenger. Ou plutôt des chatbots, des robots qui vous font la conversation. Et qui, surtout, ont souvent quelque chose à vous vendre. Compagnies aériennes (KLM), centrales de réservation (Voyages-SNCF), médias (CNN) ou encore météo (Poncho)… nombreux sont les prestataires de services qui ont désormais une folle envie de discuter avec nous.
A l’heure actuelle, seule une poignée de bots se baladent sur l’application de conversation. Ou plutôt sur Facebook, puisque c’est bien par l’application principale – ou le site lui-même – que nous sommes allés à leur rencontre. Sur la page des entreprises ayant déjà lancé leur bot, un clic sur l’onglet “Contacter” entraîne automatiquement l’ouverture d’une conversation, avec le message “Get Started” (“Démarrez”).
Nicolas Sarkozy? Connaît pas
Nous avons entamé la discussion avec CNN – aucun média francophone n’ayant pour le moment franchi le pas. Première phrase, le géant américain prévient qu’il nous enverra dorénavant un briefing tous les matins. Nous voici donc abonnés à une newsletter. Le bot nous incite ensuite à lui demander des informations concernant tel ou tel sujet, en citant des termes comme “politique” ou “réfugiés”. Un recherche par mots-clés comme le fait Google depuis une vingtaine d’années.
En tapant “François Hollande”, CNN nous renvoie vers un papier annonçant la démission de Christiane Taubira, daté du 27 janvier dernier. Par souci d’équité, nous tapons “Nicolas Sarkozy”. Inconnu au bataillon. On ne peut pas en vouloir à CNN de ne pas être incollable sur la politique française. En tapant “Obama”, on tombe sur un papier publié le 29 mars dernier, alors que le média a sorti un article sur le président américain pas plus tard qu’il y a 48h. On se demande donc de quelle manière se fait l’analyse de notre requête. Quelques heures après, nous recevons un message de CNN, surtitré “article qui pourrait vous plaire”. Il concerne le catch américain. L’utilisation du conditionnel était justifiée.
Le bot médecin n’est pas pour demain
Nous nous tournons ensuite vers le Wall Street Journal. Là encore, on nous propose un accès aux articles les plus importants de la journée. Mais l’approche se fait plus pointue, en nous incitant à demander des cours de bourse. Pour ce faire, il faut taper le signe “$”, suivi du code de l’action (“$AAPL” pour Apple). On peut également taper “look up Apple” (“suivre Apple”). Un graphe s’affiche alors, avec l’évolution de l’action en question. Au-dessous, trois onglets. “Plus info” (pour obtenir des informations financières détaillées), “Dernières actualités” et “Suivre”. En choisissant la troisième option, on aura droit à un résumé quotidien concernant l’entreprise en question. Dans la journée, le Wall Street Journal comme CNN nous enverront spontanément bien d’autres messages, plus ou moins pertinents.
Nous avons ensuite fait un tour du côté de HealthTap, un service américain de médication en ligne, qui offre l’aide de médecins à toute heure. Première info, nos questions et notre identité resteront confidentielles. Une bonne chose. Mais après avoir reçu notre première question (“Comment soigner ma grippe?”), on nous prévient gentiment que les réponses apportées ne peuvent être considérées comme des conseils médicaux. Il reste encore un peu de marge avant qu’un bot ne prenne la responsabilité de nous prescrire une semaine d’antibiotiques. Nous demandons ensuite de l’aide pour arrêter de fumer. Plusieurs articles concernant l’arrêt du tabac apparaissent alors. Là encore, on retombe donc dans la simple recherche de contenu.
Pour finir avec romantisme – et pour tester le seul bot “réellement” commercial à ce jour, nous avons fait un tour chez 1-800-Flowers, un fleuriste américain. Après nous avoir demandé l’adresse du destinataire, on nous interroge sur le type d’occasion à fêter, avant de soumettre une sélection. Après avoir choisi un bouquet jaune d’un goût plutôt douteux, nous indiquons au bot une adresse de facturation, le message qui doit accompagner le bouquet et bien entendu notre numéro de carte de crédit.
Pour cette dernière étape particulièrement sensible, on nous redirige vers un site sécurisé. Au final, le processus aura été simple et rapide. On a également la possibilité d’enregistrer nos informations – non bancaires – directement sur Messenger, pour ne pas avoir à les saisir de nouveau par la suite.
Parmi la quarantaine de bots déjà annoncés, on retrouve de grands noms comme Burger King – pour commander son menu en amont, Expedia – pour réserver son voyage, ou encore Zalando – pour se faire livrer une paire de chaussures. On s’imagine bientôt évoluer en vase clos dans l’environnement de Facebook. Mais cela ne devrait pas être sans conséquences.
Des nouveaux amis un peu collants
Pour que l’expérience soit réellement intéressante, il faudra jouer le jeu à fond. Et cela passe par confier ses coordonnées bancaires à Facebook. Parmi les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), le site de Zuckerberg est finalement le seul à ne pas nous les avoir réclamées plus tôt. Jouer le jeu passe aussi par de la pratique, afin de se faire sagement étudier par les différents bots. Pour que les marques puissent nous proposer quelque chose de pertinent, il faudra les laisser profiter des nombreuses informations confidentielles que Facebook possède déjà. Données de localisation, films préférés, plats préférés, musiques préférées, types de chatons préférés.
Mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, nous avons plusieurs messages non lus de nos nouveaux amis. Deux de CNN, et deux du Wall Street Journal. Et c’est là que l’on se pose une question : comment filtrer les “vrais” des “faux” messages? Comment éviter cet effet déceptif lorsqu’on attendra un message de notre meilleur ami en road trip à l’autre bout du monde, et que l’on découvrira un message de Carrefour annonçant une ristourne sur les gencives de porc?
Ou plus simplement, comment éviter que notre messagerie Facebook ne se transforme en gigantesque boîte à spam? Après avoir fermé les conversations, nos potes bots sont malgré tout revenus à la charge. Pour les éviter, pas d’autre choix que de les bloquer. Sympas, ces nouveaux amis, mais peut-être un peu lourds.
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