L’Union européenne siffle la fin de la récré pour les géants du numérique. Samedi dernier, un accord a été trouvé entre le Parlement européen et le Conseil européen sur la nouvelle législation sur les services numériques, ou « Digital Services Act » (DSA). Le but de ce texte est de protéger les consommateurs et de renforcer la transparence des plates-formes. Ces dernières vont avoir de nouvelles responsabilités à porter, sous peine d’une amende pouvant aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires global, voire d’une exclusion du marché commun.
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Le nombre de ces obligations est croissant en fonction de la taille des acteurs et de leur impact sur l’écosystème numérique. Quatre catégories sont ainsi définies, du plus général au plus spécifique :
- les services intermédiaires proposant des infrastructures de réseau
- les services d’hébergement tels que les services en nuages et d’hébergement en ligne
- les plates-formes en ligne réunissant vendeurs et consommateurs
- les très grandes plates-formes en ligne qui atteignent plus de 10 % des 450 millions de consommateurs en Europe.
Dans cette dernière catégorie, on retrouvera évidemment tous les géants high-tech comme Google, Facebook, Microsoft, Apple ou Amazon. Ils devront évaluer les risques liés à leurs services, se soumettre à des audits et coopérer en cas de crise, notamment pour lutter contre des campagnes de désinformation. Ils devront être transparents sur le fonctionnement de leurs algorithmes de recommandation et de choix des utilisateurs pour l’accès à l’information. Ils devront également partager des données avec les autorités et les chercheurs, ce qui permettra à ces derniers de savoir comment les risques en ligne évoluent.
France Haugen se montre ravie
Ces obligations découlent en partie du rôle néfaste qu’ont joué Facebook et Twitter lors de certains processus électoraux, comme l’assaut du Capitole en 2021. Il n’est donc pas étonnant de voir Frances Haugen, ex-salariée Facebook et lanceuse d’alerte, se réjouir ouvertement de ce paquet législatif.
« Félicitations !! Pour la première fois dans l’histoire, le public va pouvoir poser des questions indépendantes sur le fonctionnement de Meta et des autres grandes plates-formes, et récupérer des données pour voir la vérité. C’est un moment historique. Allez les États unis, maintenant c’est notre tour », a-t-elle écrit sur Twitter.
La face sombre d’internet concerne aussi les plates-formes de vente envahies de produits contrefaits ou défectueux, qui peuvent s’avérer dangereux à l’instar des jouets d’enfants ne respectant pas les normes de sécurité. Le nouveau règlement stipule l’obligation de retirer « promptement » tout contenu illicite (selon les lois nationales et européennes) dès qu’une plate-forme en a connaissance. Il contraint les réseaux sociaux à suspendre les utilisateurs violant « fréquemment » la loi.
Le DSA obligera les sites de vente en ligne à contrôler l’identité de leurs fournisseurs avant de proposer leurs produits. Par ailleurs, il interdit les interfaces trompeuses (« dark patterns ») qui poussent les internautes vers certains paramétrages de compte ou certains services payants. Il interdit aussi l’utilisation des données sur les opinions politiques à des fins de ciblage publicitaire.
En vigueur pas avant 2024
Inutile de préciser que les entreprises du numérique ont essayé de faire front contre cette nouvelle loi, mais sans succès. La lutte n’est toutefois pas encore terminée. Le lobby des grandes entreprises du numérique CCIA a estimé samedi qu’« un certain nombre de détails importants » devaient être « clarifiés », de façon à ce que « la législation finale permette à toutes les entreprises, grandes et petites, de se conformer aux règles dans la pratique ».
Le DSA doit être encore être adopté de manière formelle par le Parlement et le Conseil. Le texte sera en vigueur 15 mois plus tard, et pas avant le 1er janvier 2024.
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