En refusant de se saisir du dossier Epic v. Apple, la Cour suprême américaine a inscrit dans le marbre le jugement de la précédente cour : Apple doit permettre aux développeurs de communiquer aux utilisateurs d’autres moyens d’acheter du contenu supplémentaire dans leurs apps.
Des conditions draconiennes
Concrètement, les applications qui le souhaitent peuvent afficher un lien ou un bouton indiquant une promotion ou un prix moins élevé sur le site web de l’éditeur. Dans les jeux — la principale catégorie concernée, puisque c’est la vache à lait de l’App Store — cela peut être des paquets de gemmes ou autres consommables, des cosmétiques, des niveaux supplémentaires, etc.
Ce qui ressemble à une petite concession de la part d’Apple ne l’est manifestement pas tant que ça : la firme à la pomme a tout de même ferraillé quatre années devant les tribunaux pour éviter d’en passer par là !
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Apple, qui avait visiblement préparé le coup, a mis à jour les guidelines, un ensemble de règles byzantines que les développeurs doivent suivre à la lettre pour que leurs apps puissent être distribuées dans l’App Store. Ils y découvriront la possibilité qui leur est faite de promouvoir leur boutique en ligne avec un lien ou un bouton.
Mais attention, pour obtenir ce privilège, il faudra passer par un véritable parcours d’obstacles pour une excellente raison. Apple compte bien prélever sa sacro-sainte commission sur la transaction, qu’elle soit effectuée avec son système de paiement ou ailleurs ! Il faut tout d’abord savoir que cette largesse se limite aux États-Unis. Les développeurs devront demander l’autorisation d’utiliser le StoreKit External Purchase Link, un processus qui nécessite de remplir des critères spécifiques et de suivre un cahier des charges très précis.
Le lien doit mener au site web sans redirection, il ne doit pas lancer une vue web mais une nouvelle fenêtre du navigateur choisi par défaut par l’utilisateur. La page web a interdiction de copier l’interface de paiement du système d’Apple, ni décourager les utilisateurs à utiliser le système de paiement d’Apple. Le design du lien ou du bouton doit également respecter un style très spécifique. Et à chaque fois que l’utilisateur touche le fameux lien en question, l’app doit afficher une alerte qui pourra en effrayer plus d’un :
Le jeu en vaut-il la chandelle ? La question mérite d’être posée, puisque le développeur devra verser une commission à Apple pour chaque transaction : elle sera de 12 % pour ceux qui adhèrent au programme Small Business (la majorité d’entre eux), ou de 27 % pour les autres. Dans les deux cas, c’est 3 petits points de moins que la commission standard… Et puis la commission devra être versée si la transaction a été réalisée dans les 7 jours du clic sur le lien.
Le constructeur justifie cette commission par le fait que les développeurs utilisent des « technologies et des outils propriétaires protégés par la propriété intellectuelle » (kits de développement, API, mises à jour de la plateforme…) et accèdent à la base utilisateurs d’Apple.
En mars dernier, Apple avait déjà dû faire une concession pour les apps de type « reader », une catégorie très large qui comprend aussi bien les apps pour lire des journaux ou des livres, écouter de la musique ou regarder des vidéos. Ces dernières peuvent proposer aux utilisateurs de gérer ou de créer un compte directement depuis le site web de l’éditeur, avec là aussi des conditions draconiennes.
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On verra comment l’entreprise compte gérer les développeurs qui, en Europe, décideront de se passer de l’App Store pour leur système de paiement, mais il est probable que les conditions soient similaires. Ce sont d’ailleurs les mêmes qui régissent le fonctionnement des systèmes de paiement alternatifs dans les apps de rencontre aux Pays-Bas.
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Mise à jour 18/01 — Spotify a tenu à réagir après les changements annoncés par Apple. Sans surprise, la plateforme de streaming ne mâche pas ses mots pour « protéger les revenus réalisés au détriment des développeurs et des consommateurs dans le cadre de son monopole via l’App Store », nous rapporte un porte-parole. Les 27 % de commission sont qualifiés de « scandaleux »
« La loi européenne sur les marchés numériques (DMA) devrait enfin mettre un terme à cette apparente conformité, qui maintient le système de redevances d’Apple tel qu’il existe », précise-t-il. « Nous demandons instamment à la Commission européenne d’agir rapidement et de manière décisive pour empêcher Apple de mettre en place des système similaires, interdits par la loi sur les marchés numériques ».
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Source : Apple