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On a testé l’overclocking à l’azote liquide au Computex

Sur le stand du fabricant de mémoire G.Skill, le collectif d’overclockers HWBOT proposait des initiations à l’overclocking au LN2 (azote liquide), mêlant théorie et pratique. L’occasion était trop belle pour être manquée !

Overclocker (traduisez « surcadencer ») est, pour beaucoup, l’apanage de nerds qui prennent un plaisir sadique à torturer leur processeur afin d’en tirer quelque puissance supplémentaire et impressionner le voisin. Pour HWBOT –regroupement officiel d’overclockers- et, par extension, toute une communauté de passionnés, c’est une vraie discipline.

Voire même un sport, qui requiert des connaissances techniques, physiques voire chimiques très pointues. Surtout lorsqu’on manipule des produits comme l’azote liquide (LN2) -ou de l’hélium- en guise de liquide de refroidissement et que l’on soumet le processeur, mais aussi la carte mère, la mémoire voire la carte graphique à des conditions d’utilisation extrêmes.

De fait, l’overclocking est en réalité très loin du simple loisir pour geeks de l’extrême. C’est aussi devenu une pratique importante et reconnue dans l’industrie du composant pour PC. Ainsi, lorsque de célèbres overclockers ne parviennent pas à pousser les processeurs aussi haut que la théorie devrait le permettre, ils sont souvent mis en relation avec des certains ingénieurs Intel ou AMD pour comprendre et identifier ce qui pourrait coincer dans la montée de fréquences et sur quel paramètre jouer sur les nouvelles séries de puces pour que la magie opère.

AS/01net.com – La carte mère (Asus ici) n’est pas blanche normalement… elle est noire. Elle apparait blanche car protégée par un vernis pour éviter tout phénomène de condensation et donc, de court-circuit.

Température négative, gigahertz et chalumeau : processeur, ton die va souffrir !

A quelques exceptions près (comme les derniers Ryzen d’AMD), un processeur (Intel ou AMD) n’est pas “nativement” équipé pour être overclocké à l’azote. Pour le préparer, il faut enlever la plaque métallique sur laquelle sont inscrits le nom et la série de la puce au moyen d’un accessoire spécialement prévu à cet effet. Puis changer la pâte thermique qui se trouve entre le die (le circuit) et la plaque. Ceci afin que les températures négatives générées par l’application de l’azote liquide dans le dispositif de refroidissement soient mieux encaissées par la puce et, surtout, ne l’endommagent pas. Une fois l’échange de pâte effectué, il faut recoller la plaque avec une colle spéciale (isolante et/ou au silicone).

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Avant de commencer à « jouer », il faut aussi isoler les éléments vitaux de la carte mère, comme les abords du socket mais aussi les étages d’alimentation (vaseline, gomme spéciale ou mousse néoprène). Après, il faut recouvrir le tout de papier absorbant (bleu sur la photo ci-dessus) pour encore plus de protection. Papier que l’on retrouve aussi parfois sur tout le pourtour de l’impressionnant dispositif qui coiffe le processeur.

Sur le processeur vient se positionner un gros bloc de métal (cuivre généralement), massif et lourd (jusqu’à 4 kg). Plus il est lourd et épais, meilleure est la conductivité du refroidissement. Ce bloc, appelé « godet » dans le jargon, est en partie creux, criblé de trous de diamètres différents.

AS/01net.com – Le “godet” est un bloc de cuivre massif, de plusieurs kilos, qui vient se positionner sur le processeur.

C’est une pièce essentielle car c’est le godet qui accueille l’azote liquide lors de la session. Sa composition et sa structure lui permettent de maintenir aux mieux des températures toujours plus basses. Le godet est lui-même surmonté d’un radiateur rectangulaire, creux lui aussi en son centre, et qui cheville l’ensemble à la carte mère.

Il ne reste plus ensuite qu’à raccorder les différentes sondes de température préalablement disposées entre le godet et le processeur et à la base du socket. Cela permet d’avoir deux données différentes et de surveiller que le socket soit toujours maintenu à une température inférieure à celle de la puce. Sans rentrer dans les détails, cette différence est essentielle pour que la séance d’overclocking ne tourne pas mal pour les composants.

AS/01net.com – En haut, la température relevée sur la plaque métallique du processeur. En bas, la température relevée au niveau du socket et donc du circuit en silicium même de la puce.

Pour finir, il faut se munir de deux choses. D’abord… de thermos ! A remplir de liquide fumant stocké dans de grosses bonbonnes maintenant l’azote à état liquide.

Adrian Branco

Second élément à garder à portée de main : un chalumeau, qui sert à faire fondre la glace résultant de la condensation (l’ennemie ultime de l’overclocker) sur les lamelles du radiateur… mais aussi à refaire monter la température de la puce, soit temporairement avant de reverser de l’azote dessus, soit entre deux sessions d’overclocking pour lutter contre le phénomène de Cold Bug (refus de démarrage des composants qui ont trop froid).

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On se jette dans le bain d’azote

Bien entendu, pas d’assemblage complexe pour nous. Nous nous sommes contentés d’avoir les explications théoriques et préliminaires car la plateforme était déjà assemblée à notre arrivée. Sous la tutelle de Pieter-Jan Plaisier, Directeur de HWBOT, nous avons fait nos premiers déversements d’azote dans le godet.

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Mais l’overclocking ne se limite pas à bêtement  verser de l’azote et regarder la température descendre sur les sondes thermiques. Il y a aussi et surtout des ajustements à opérer via des interfaces logicielles. Celles-ci se substituent au BIOS et fonctionnent dans un environnement Windows (bien souvent XP d’ailleurs). C’est plus pratique et bien plus flexible que les menus des microprogrammes des cartes mère, même si ces derniers ont clairement gagné en lisibilité et facilité de navigation depuis le passage à l’UEFI.

Dans les interfaces logicielles pensées pour l’OC, en quelques clics de souris, on ajuste par exemple le voltage appliqué à différents éléments du processeur, on augmente ou réduit la fréquence du bus ou du coefficient multiplicateur. Ainsi, l’overclocker doit toujours garder un oeil sur les sondes, l’autre sur l’écran de son PC et réagir parfois très vite en fonction des résultats affichés ou du comportement du matériel pour éviter que la plateforme ne se coupe… ou pire.

Le processeur sélectionné pour subir nos outrages était un Core i7-7700K d’Intel monté sur une carte mère Asus ROG en Z270 et des barrettes de mémoire G.Skill à  haute fréquence pour s’assurer que les communications entre les composants puissent s’établir à pleine vitesse et maintenir l’ensemble stable. Car tout l’art et toute la difficulté sont là : pour qu’un résultat d’overclocking soit valide (voire homologué en compétition), il faut que la plateforme demeure stable pendant un certain temps et soit capable de faire tourner des benchmarks reconnus dans le milieu (SuperPi, PiFast ou CineBench).

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Durant notre session, nous avons réussi à faire tourner le processeur à un bon 5,6-5,8 GHz (contre 4,2 GHz normalement) avec tous les cœurs activés (hyperthreading désactivé). Il nous a fallu suivre les recommandations de notre moniteur à la lettre. Nous l’avons d’abord observé pendant quelques minutes puis, ensuite, nous avons à notre tour pu verser de l’azote, jouer sur les différents réglages de l’interface logicielle, ajuster quelques variables d’un coup de clic de souris puis reverser de l’azote, observer, attendre que le processeur se stabilise, puis réajuster les voltages ou les vitesses de bus, etc. Le tout sur les conseils et diverses approbations de l’expert présent à nos côtés. Ce dernier a même souvent repris la main car il trouvait que la plateforme se montrait particulièrement récalcitrante à monter au dessus de certaines fréquences.

De la capacité des composants à résister à l’OC

Il faut dire que tous les processeurs d’une même référence ne sont pas égaux face à l’overclocking, aussi bonne et rigoureuse que soit la préparation. Les cartes mères encaissent plus ou moins bien les charges également, sans compter que la qualité d’un BIOS (souvent conçu spécialement pour les compétitions ou l’OC) entre aussi en ligne de compte.

Ainsi, Pieter-Jan de HWBOT nous a expliqué qu’un record (ou même l’atteinte de très hautes fréquences) était réalisable au bout de seulement trois ou quatre essais dans une journée. Et pouvait même prendre une voire deux semaines, laissant au passage sur le carreau d’innombrables processeurs, cartes mères et beaucoup d’argent parti en fumée sous forme d’azote !

Après l’azote à -196°C, l’hélium à -269°C

Il faut savoir varier les plaisirs, même quand on est un overclocker. Ainsi, lors d’une soirée HWBOT précédant le lancement officiel de la nouvelle plateforme Intel, les équipes d’OC Asus ROG se sont lancées un défi fou : parvenir à overclocker le tout nouveau Kaby Lake-X Intel Core i7-77400K à plus de 7 GHz.

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Pari réussi puisqu’ils sont parvenus à atteindre 7,56 GHz exactement. Et pour ce faire, l’azote seul ne suffit pas. Il faut aussi de l’hélium. La difficulté c’est que ce dernier ne se comporte pas du tout de la même manière. Et il n’est vraiment efficace que lorsque le processeur a déjà été amené à basse température à l’aide de l’azote.

AS/01net.com – Pour éviter tout incident avec l’hélium, il faut utiliser un long bec verseur pour injecter le liquide directement au coeur du godet et à petite pression pour éviter toute projection.

C’est donc à -269°C (pas de faute de frappe) que le Core i7 s’est vu réfrigéré pour monter si haut en fréquence.

Le record établi lors de cette soirée reste à battre puisque les processeurs Kaby Lake-X ne vont pas tarder à massivement débarquer sur le marché et que de nombreuses compétitions d’overclocking devraient avoir lieu cet été. De plus,  les processeurs à plus de 10 coeurs Skylake-X Core i9 -en approche- seront aussi tout autant de nouvelles puces à éprouver à grand coup d’azote ou d’hélium afin de les pousser à des vitesses complètement folles. Juste pour l’amour de la prouesse technique.

Retrouvez l’intégralité de notre dossier Computex 2017

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