La directive qui doit réformer le droit d’auteur a été adoptée ce matin à 438 voix contre 226 par le Parlement européen. Le texte a été l’objet d’une bataille sans précédent entre artistes et éditeurs de presse d’une part, et géants du numérique et activistes de la liberté sur internet d’autre part.
Un nouveau droit voisin
Deux articles sont très controversés. L’article 13 incite les plate-formes à mieux rétribuer les créateurs de contenus, ce qui va obliger les sites à nouer des contrats avec tous les ayants droits. En absence d’accord, les plate-formes pourraient empêcher la mise en ligne des contenus. L’article 11 crée un nouveau droit voisin du droit d’auteur pour les éditeurs de presse. Il permet aux médias de se faire rétribuer si les plate-formes numériques – à l’image de Google Actualités- diffusent ou agrègent de simples extraits d’articles accompagnés d’un lien.
Un hyperlien seul vers des articles, ainsi que des mots isolés pour les décrire ne suffiront pas, en revanche, pour invoquer le droit voisin. Par ailleurs, des sites encyclopédiques non commerciaux comme Wikipedia, des plate-formes de logiciel libres comme GitHub, ainsi que les petites et micro-plateformes sont exclus de cette directive.
Emmanuel Macron soutenait le texte
Depuis que la Commission européenne avait présenté le 14 septembre 2016 son projet de directive, les discussions entre eurodéputés avaient été complexes et sujettes à un lobbying intense de toute part. A la nouvelle de l’adoption, la SACD (Société des auteurs et compositeurs dramatiques) s’est félicitée aussitôt « d’une avancée majeure au profit des auteurs ».
Emmanuel Macron lui-même avait pris la parole sur Twitter pour soutenir le texte avant le vote :
Aujourd’hui se joue un combat fondamental pour le droit d’auteur : protéger la création et l’information, c’est assurer notre liberté et défendre notre modèle. L’Europe doit être à la hauteur de sa culture.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) September 12, 2018
La directive était combattue logiquement par les géants américain du web. « Le droit voisin limitera le partage des actualités en ligne et le filtre de téléchargement limitera les téléchargements d’utilisateurs », a prévenu Siada El Ramly, la directrice générale d’EDiMA, un lobby de la Silicon Valley. Elle espère toutefois encore un infléchissement de la position européenne lors de la seconde étape des négociations.
Les défenseurs des libertés numériques étaient contre
L’association la Quadrature du net s’y est aussi opposée. Pour elle, il vaudrait mieux combattre les GAFAM plutôt que « de réclamer les miettes d’une économie de la surveillance de masse ». La directive va permettre en effet de récupérer une partie des revenus publicitaires des géants du web, obtenus grâce à la publicité ciblée et donc à la surveillance des internautes. La solution serait plutôt, selon elle, de changer complètement de cadre et promouvoir un Internet décentralisé.
D’autres défenseurs des libertés numériques se sont élevés contre ce paragraphe 11, poussant jusqu’à l’absurde le raisonnement des éditeurs :
Le Musée du Louvre devrait exiger une rémunération de la RATP pour ces millions de touristes qui affluent chaque année grâce au métro. #CopyrightDirective https://t.co/mdLJgdcNlm
— marc rees (@reesmarc) September 9, 2018
Les discussions à huis clos vont désormais débuter entre les représentants du Parlement européen, du Conseil et de la Commission. Elles peuvent prendre plusieurs mois avant d’arriver à un texte de compromis entre les deux co-législateurs et l’exécutif européen. Ce texte devra à nouveau être soumis au vote du Parlement.
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