De plus en plus de personnes sont connectées à Internet chaque année, mais le taux de croissance ralentit drastiquement. Dans un rapport que publiera la Web Foundation le mois prochain, auquel The Guardian a eu accès en avant-première, on apprend que la croissance de l’accès à Internet est passé de +19% en 2007 à +6% en 2017. Plus inquiétant, cette courbe est en diminution constante depuis 2014.
Des inégalités de plus en plus fortes
« Nous avons sous-estimé le ralentissement et le taux de croissance est désormais vraiment préoccupant » reconnaît Dhanaraj Thakur, le directeur de la recherche de la Web Foundation. 3,8 milliards de personnes n’ont pas accès à Internet aujourd’hui, ce qui bien plus que ce qu’anticipaient les Nations Unies en 2014. La moitié de l’humanité devait être connectée en 2017, il faudrait finalement attendre mai 2019, au mieux.
Le problème, c’est que ce ralentissement de la croissance d’Internet pose de vrais soucis économiques. Les 3,8 milliards de personnes non connectées n’ont pas accès aux informations, aux services publics, aux groupes sociaux ou encore à l’éducation, ce qui entretient les inégalités. Le rapport pointe aussi les disparités entre hommes et femmes, ces dernières étant jusqu’à deux fois moins connectées dans les zones reculées, souvent pour des raisons sociales. Certaines populations porteraient un mauvais regard sur les femmes propriétaires d’objets comme un smartphone.
Selon l’University of California de Berkeley, il y aurait un rapport direct entre l’économie d’un pays et son taux de connexion. Les chercheurs ont constaté qu’une augmentation de 10% de la population connectée résulterait dans une augmentation de 1,35% du PIB, du moins dans les pays développés. Tout porte à croire qu’en améliorant le taux de connexion dans le monde, les inégalités pourraient donc être diminuées. Les pays les moins connectés comme l’Erythrée (1,2% de la population), le Somalie (1,9%) ou la Guinée-Bissau (3,8%) font d’ailleurs partie des plus pauvres.
Un problème de télécom avant tout ?
Comment expliquer un tel ralentissement ? Le rapport de la Web Foundation semble aller dans le sens d’un abandon des zones blanches par les opérateurs télécom. Couvrir d’aussi vastes régions coûte très cher et le retour sur investissement n’est pas toujours assuré. Autre problème, même là où les habitants peuvent se payer un abonnement mobile, ils ne savent pas forcément comment l’utiliser et ne sont pas forcément encouragés à apprendre. « Ce n’est pas qu’un problème de connectivité » explique Malcolm Johnson, vice-secrétaire national de l’union internationale des télécommunications. « Vous devez faire en sorte que payer pour se connecter en vaille la peine. Il doit y avoir un contenu qu’ils peuvent comprendre et qui leur soit bénéfique. »
Pour pallier ce problème, Malcolm Johnson salue des initiatives comme les constellations de satellites (promises notamment par Elon Musk) ou l’accès à Internet par ballons (développé par Google). De nouvelles méthodes qui peuvent faire « une différence énorme ». Rappelons que dans certains pays comme la Birmanie, Facebook a connecté une grande de la population pour le meilleur comme pour le pire. Le réseau social est en effet accusé d’avoir laissé se propager la désinformation et de haine, comme le dénonçait récemment l’humoriste John Oliver dans son émission.
Toujours est-il que 3,8 milliards de personnes ne sont pas connectées à Internet aujourd’hui et que, sans accélération du côté des opérateurs télécoms, les inégalités économiques ne peuvent que se renforcer.
Source :
The Guardian
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