Le créateur américain du célèbre logiciel antivirus s’est suicidé mercredi dans une prison en Espagne, où un tribunal venait d’ordonner son extradition aux États-Unis qui l’accusent de fraude fiscale. Cet homme d’affaires de 75 ans a été retrouvé mort dans sa cellule de la prison Brians 2 située près de Barcelone. « Apparemment il s’est suicidé », a expliqué une porte-parole des autorités pénitentiaires de Catalogne, dans le nord-est de l’Espagne, sans fournir de détails. Une porte-parole de la section catalane du Conseil général du pouvoir judiciaire (CGPJ) — un organe indépendant notamment chargé de nommer les juges — a confirmé de son côté que John McAfee avait été retrouvé mort dans sa cellule autour de 19 h locales.
Dans un communiqué, le ministère de la Justice de Catalogne a simplement déclaré qu’une enquête avait été ouverte après qu’un prisonnier âgé de 75 ans encourant une mesure d’extradition aux États-Unis, dont il n’a pas fourni l’identité, avait été retrouvé mort dans sa cellule. « Les gardiens et le personnel médical sont immédiatement intervenus pour tenter de le ramener à la vie, mais les médecins ont finalement certifié qu’il était mort », a-t-il ajouté. Selon Reuters, qui a interrogé son avocat, le millionnaire s’est pendu.
Promotion de cryptomonnaies
Après avoir fait fortune avec son antivirus dans les années 1980, John McAfee était devenu un gourou des cryptomonnaies grâce auxquelles il affirmait gagner 2 000 dollars par jour et était suivi par près d’un million de personnes sur Twitter. Il avait été arrêté en octobre 2020 à l’aéroport de Barcelone, juste avant d’embarquer à bord d’un avion à destination d’Istanbul, au lendemain de la publication par un procureur américain d’un acte d’accusation le visant notamment pour avoir omis de déclarer des millions de dollars de revenus issus de la promotion de cryptomonnaies. Il avait alors été placé en détention provisoire.
Selon la justice américaine, John McAfee a aussi dissimulé des biens, notamment immobiliers, un yacht et une voiture en les mettant au nom d’autres personnes. Les autorités américaines avaient émis un mandat d’arrêt via Interpol et demandé son extradition. Il risquait de se voir infliger une peine allant jusqu’à trente ans de prison. L’entrepreneur a d’ailleurs été inculpé en mars par la justice américaine pour avoir promu auprès de ses fans sur Twitter plusieurs opérations liées aux cryptomonnaies sans leur dire qu’il allait probablement en retirer de coquettes sommes.
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Le feu vert donné en Espagne par un tribunal, l’Audience nationale, à son extradition pouvait encore faire l’objet d’un recours judiciaire et cette mesure devait aussi être approuvée par le gouvernement espagnol. Selon la demande d’extradition américaine déposée en novembre, et citée dans la décision du tribunal, John Mc Afee a gagné plus de 10 millions d’euros (12 millions de dollars) entre 2014 et 2018, mais n’a jamais effectué de déclaration de revenus. La décision du tribunal espagnol ne faisait en revanche référence qu’à des infractions commises entre 2016 et 2018.
Dans un tweet du 16 juin, John McAfee avait souligné que les autorités américaines pensaient qu’il avait des cryptomonnaies « cachées ». « J’aurais aimé que cela fût vrai », avait-il poursuivi. « Tout ce qu’il me restait a été saisi (…) Je n’ai rien. Pourtant, je ne regrette rien ».
Sa femme Janice s’est quant à elle longtemps plainte de la dureté, à la fois au plan physique et au plan mental, des conditions de détention de son mari. « Il ne se portait pas bien » en prison où, selon elle, il n’a pu bénéficier qu’avec des retards de « soins médicaux appropriés ». « Les autorités américaines sont déterminées à voir John mourir en prison (…) Il n’y a aucun espoir qu’il n’ait jamais un procès équitable en Amérique », avait-elle accusé dimanche sur Twitter.
Belize, le début de la déchéance
John McAfee avait commencé sa carrière à la Nasa avant de travailler dans plusieurs entreprises informatiques. Il avait fondé en 1987 la société McAfee, qui devient un géant des logiciels antivirus et qu’il revend à Intel en 2010. La success-story prend ensuite un tournant inattendu : John McAfee défraie la chronique, en 2012, lorsque son voisin au Belize, un petit pays d’Amérique centrale, avait été mystérieusement assassiné, une affaire toujours pas élucidée à ce jour.
La police avait alors découvert qu’il vivait avec une jeune fille de 17 ans et qu’il détenait plusieurs armes dans sa maison. John McAfee s’était lancé dans une cavale rocambolesque qui avait tenu les médias en haleine pendant un mois. « Je ne suis pas un fou », avait-il déclaré à l’époque. « Je suis excentrique, courtois, attentionné, gentil, plein d’humour. Nous, les humains, sommes des créatures amusantes ».
Un documentaire intitulé « Gringo : The Dangerous Life of John McAfee » diffusé en 2016 évoquait sa vie au Belize. En 2015, il avait été arrêté aux États-Unis pour conduite sous l’emprise de stupéfiants et s’était fait ensuite discret dans les médias, jusqu’à janvier 2019 lorsqu’il avait fui son pays tout en disant vouloir en briguer la présidence.
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