Les hackers qui se sont rendus cette année à la traditionnelle « Nuit du Hack 2017 » – qui s’est déroulée du 24 au 25 juin – ont eu la surprise de voir un exposant assez inhabituel pour ce genre de manifestation : le ministère de la Défense. Bardée de flyers, de dépliants et de kakemonos, la « grande muette » a décidé de sortir de son mutisme traditionnel pour toucher la fibre patriotique de tous ces petits génies en informatique. Les affiches arboraient un slogan simple et percutant : « Devenez combattant numérique ».
Evidemment, cela ne suffit pas pour attirer le geek-hacker de base, venu parfois de loin dans cet hôtel de Disneyland pour pirater entre potes. C’est pourquoi les affiches déployées diffusent d’emblée quelques messages complémentaires : « un réseau de 180.000 machines », « partout dans le monde », « des possibilités de carrières », « des postes militaires ou civiles », etc. Ceux qui ont mordus à l’hameçon pouvaient remplir sur place un petit formulaire de prise de contact, ou repartir avec la carte de visite officielle de la CyberDéfense qui invite à envoyer CV et lettre de motivation à l’adresse unique [email protected] (spammeurs s’abstenir).
Histoire de vraiment attirer le chaland, le « MinDef » n’a pas hésité à sortir le grand jeu et faire venir dès samedi midi le vice-amiral Arnaud Coustillière, commandant de la cyberdéfense, sur la scène principale de la Nuit du Hack. Habillé à la cool en polo, pantalon de loisirs et mocassins en daim, l’officier de marine cite abondamment Sun Tzu, le célèbre général chinois auteur de « L’art de la guerre ». Ecrit au VIe siècle avant Jésus-Christ, cet ouvrage fait l’apologie de la guerre sans lutte physique, à coup de ruse, d’espionnage et de tromperie. Une combat d’intelligence qui, selon Arnaud Coustillière, serait parfaitement adapté à la cyberguerre d’aujourd’hui. « Ce n’est pas la technique qui nous limite. C’est principalement être plus intelligent, plus innovant, plus inventif que celui qui est en face et avoir un coup d’avance sur lui », souligne-t-il.
Et la place du hacker dans tout cela ? C’est lui « qui va produire l’exploit » qui est l’équivalent numérique « de la balle du fusil ou du boulet du canon ». « Il devra trouver le moyen final et nous devrons lui fournir la façon d’arriver. C’est un vecteur, une charge, le tout encadré par le droit des conflits armés et la garantie que l’on ne produise pas l’effet qu’on ne veut pas. Le hacker c’est l’équipier du commando, celui qui fait les cent derniers mètres dans une attaque à l’intérieur d’un processus beaucoup plus large », ajoute le vice-amiral.
Un recrutement large, des parcours individualisés
Mais attention, le ministère de la Défense ne s’intéresse pas qu’aux hackers. Tous les types de compétences en informatique sont recherchés au sein des « combattants numériques »: ingénierie logicielle, administration systèmes et sécurité, forensic, reverse engineering, tests d’intrusion, supervision réseaux, devops, cryptographie, etc. « Les parcours sont individualisés. Un sous-officier de Rochefort pourra commencer dans l’administration de la sécurité au sein d’un centre informatique, avant de rejoindre le CALID [Centre d’analyse de lutte informatique défensive, ndlr] pour faire de la veille et de l’analyse. Il peut également rejoindre l’un des centres spécialisés en chiffrement, en surveillance ou en lutte offensive », nous précise Hervé, chef du pôle innovation et ressource du ComCyber. Cette autorité opérationnelle rassemble depuis janvier 2017 toutes les forces de cyberdéfense de l’armée française. Celles-ci devront se monter, d’ici fin 2019, à plus de 2.600 militaires issus des trois armées et 600 experts informatiques au sein de la Direction générale de l’armement.
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