Le géant américain de l’internet Google a perdu en France un procès qui l’opposait aux maisons d’édition, ce qui pourrait remettre en cause son projet de créer une bibliothèque numérique mondiale. Au terme de trois ans et demi de procédure, le tribunal de Paris le condamne pour « contrefaçon de droits d’auteurs » et lui interdit de reproduire sur son site des livres français en intégralité. Il prohibe aussi l’accès à des extraits de livres.
Ce jugement, qui constitue la première décision de ce type, pourrait nuire aux projets de Google, qui a conclu des accords avec plusieurs bibliothèques américaines et ambitionne de reproduire ce schéma dans le monde entier pour créer une bibliothèque numérique universelle.
Toute violation de l’interdiction décidée par les juges sera punie d’une sanction financière de 10 000 euros par jour, passé un délai de 30 jours après la notification de la décision, dit le tribunal. La mesure est exécutoire provisoirement, précise-t-il, ce qui retire son caractère suspensif à l’appel que Google a décidé de déposer. Le tribunal impose à la société américaine le versement de 300 000 euros de dommages et intérêts et 45 000 euros de frais de procédure à trois sociétés du groupe La Martinière, propriétaire notamment du Seuil, qui avait engagé la procédure en 2006. Le groupe demandait 15 millions d’euros.
Le tribunal accepte dans la procédure le Syndicat national de l’édition et la Société des gens de lettres de France, si bien que la sanction s’étend à tout le secteur. Le jugement stipule que c’est la loi française, plus stricte, qui s’applique, et non le droit américain comme le voulait Google.
L’Allemagne et la France très critiques
« Ça met en l’air le projet de Google, ça le stigmatise et ça le déclare illégal. Google va être obligé de repenser toute sa stratégie en matière de numérisation d’ouvrages couverts par des droits d’auteur », a dit aux journalistes Yann Colin, avocat de La Martinière.
Le projet Google a suscité les réserves des autorités françaises et allemandes, qui craignent un pillage du patrimoine à visée commerciale. Même si l’accès aux internautes n’est possible que pour des extraits de livres, il rapporte de l’argent en publicité.
« ll faut rappeler que le projet Google encourage et facilite l’accès du plus grand nombre aux ouvrages et contribue donc ainsi à leur commercialisation », a dit aux journalistes son responsable juridique, Benjamin du Chaffaut. Les effets négatifs de cette décision, si elle était confirmée en appel, serait que les internautes français soient les seuls privés d’une partie substantielle de leur patrimoine littéraire. »
Un constat d’huissier dressé en avril 2008 et publié dans le jugement indique que le service de recherches de livres du site Google présentait par exemple 321 ouvrages pour les trois éditeurs français du groupe La Martinière.
Google développe son idée sur d’autres plans et propose aussi à la Bibliothèque nationale de France de numériser en totalité son patrimoine de livres. Nicolas Sarkozy a dit clairement son opposition à ce processus le 8 décembre. « Il n’est pas question de nous laisser déposséder de notre patrimoine au bénéfice d’un grand opérateur aussi sympathique soit-il, aussi important soit-il, aussi américain soit-il », a-t-il déclaré lors d’un discours.
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