Avec l’acquisition de l’opérateur britannique Orange, Michel Bon, PDG de France Télécom, est en passe de gagner son pari : faire de son groupe un opérateur mobile de dimension européenne. Il fait oublier ainsi quelques ratés : la licence UMTS qu’il n’a pas obtenue en Espagne, et, en Allemagne, l’acquisition par KPN de l’opérateur mobile E-Plus, qu’il convoitait. Avec Orange, France Télécom obtient cette fois ce qu’il voulait. D’autant que le marché du mobile européen est encore prometteur. Le cabinet d’études Idate estime que l’on devrait passer de 200 millions d’abonnés mobiles en Europe de l’Ouest actuellement, à plus de 300 millions en 2004. L’addition n’en est pas moins salée. Pour les 6 millions d’abonnés et plus d’Orange, France Télécom débourse 283 milliards de francs (43,2 milliards d’euros). S’y ajouteront 4,1 milliards de livres (6,56 milliards d’euros) pour la précieuse licence UMTS qui lui avait échappé au moment des enchères britanniques. L’opérateur français profite de l’occasion pour regrouper sous une même bannière l’ensemble de ses activités mobiles : Itinéris en France, Orange au Royaume-Uni et les autres activités mobiles à l’étranger des deux opérateurs. La marque Orange ayant été retenue plutôt qu’Itinéris, la nouvelle galaxie Orange s’étend dans quinze pays de l’Union européenne, d’Europe de l’Est et du Moyen-Orient (voir carte ci-dessus). “France Télécom et les opérateurs qu’il contrôle à plus de 50 % comptent 21 millions d’abonnés mobiles. Nous en aurons 30 millions à la fin de l’année “, se félicite Michel Bon. L’opérateur français reste pourtant loin derrière son concurrent britannique, Vodafone, crédité d’environ 38 millions d’abonnés et déjà présent aux États-Unis.
Réaliser des économies d’échelle sur l’achat des terminaux
France Télécom peut miser sur des économies d’échelles grâce à la taille atteinte par Orange. Sa dimension lui fera obtenir des prix auprès des fournisseurs de terminaux. Ses capacités internationales lui ont déjà permis de passer commande de 5 millions de terminaux WAP, dont un million seulement seront vendus en France d’ici à la fin de l’année. SFR dispose de facilités similaires, grâce à son accord avec Vodafone. “Quand on achète des portables par millions, on peut espérer des remises de 10 %”, indique Philippe Germond, directeur général de Cegetel. Par ailleurs, l’UMTS permet de décliner les modes de facturation des clients (au volume de données ou à la connexion). France Télécom devra donc changer les systèmes qu’il employait jusqu’ici. Mais il n’aura à investir qu’une seule fois pour ses multiples filiales. Au total, il chiffre les économies à 800 millions d’euros par an. Enfin, avec la première licence UMTS acquise avec Orange, l’opérateur peut espérer profiter de l’essor d’Internet sur les mobiles, alors que les revenus issus de la voix baissent. Selon l’ART, un abonné GSM ne ramenait plus en 1999 que 300 F ht (45,73 ?) par mois, contre 438 F ht (66,77 ?) il y a seulement deux ans.
Un prix de revient de 6 741 euros par abonné mobile
En termes de dépenses, France Télécom estime avoir payé un prix raisonnable. “Ce rachat nous revient à 6 741 euros par abonné mobile “, précise Jean-Louis Vinciguerra, le directeur financier de l’opérateur, tout en rappelant que de précédentes acquisitions ont dépassé le montant de 9 000 euros par abonné mobile (comme celle d’Orange par Mannesmann en octobre dernier). France Télécom a dû faire un effort financier considérable. Outre un apport comptant de 22,2 milliards d’euros, il va procéder à une augmentation de capital en cédant 113 millions d’actions à Vodafone. Ce dernier détiendra donc un peu moins de 10 % de son principal concurrent (sans droits de vote ni de représentation au conseil d’administration). Des accords sont prévus pour que l’opérateur français, une fois les liquidités en poche, rachète cette part en priorité. Le gouvernement a donné le feu vert à cette opération, au terme de laquelle sa participation dans France Télécom passera de 61 % à 54 %.Le gigantisme des chiffres : centaines de milliards, millions d’abonnés, dizaines de pays, ferait oublier qu’il s’agit, au bout du compte, de fournir des services aux utilisateurs. Sur ce point, les opérateurs, ivres de puissance financière, restent fort discrets. Pour en savoir plus, il faudra d’abord que se termine le jeu des alliances et rachats autour des licences UMTS allemandes et françaises.
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