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Contenu hébergé : qui est responsable ?

Le mois de juin a été très actif en matière de discussion sur la responsabilité des acteurs d’Internet et, en particulier, sur la responsabilité des hébergeurs. En effet, le législateur français et les juridictions saisies ont précisé l’état du droit dans ce domaine.

Yves Bréban, avocat à la Cour / Alain Bensoussan Avocats / Directeur du pôle Télécoms et Internet


La Cnil a un droit de regard sur les fichiers commercialisés.
L’Assemblée nationale a adopté, le 16 juin, le projet de loi sur la communication audiovisuelle modifiant la loi du 30 septembre 1986. Parmi les articles adoptés figurent la responsabilité des acteurs d’Internet. Des éléments essentiels ont donc été adoptés par les députés. Ce projet de loi paraît mettre un terme à la discussion qui existe en France depuis le mois de juin 1996 et qui avait donné lieu à la première réglementation (la loi du 18 juin 1996) déclarée anticonstitutionnelle par le Conseil constitutionnel dans sa décision du mois de juillet 1996 et notamment pour les nouveaux articles 43-2 et 43-3 de la loi du 30 septembre 1986.

L’hébergeur doit être vigilant et réagir

Parmi les points fondamentaux, il faut noter en premier lieu, la responsabilité civile ou la responsabilité pénale des personnes physiques ou morales qui assurent le stockage direct et permanent pour la mise à disposition du public de “signaux d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature” ne peut être envisagée que dans 2 cas limitatifs. Le premier est relatif au défaut de diligences accomplies “promptement” par ces personnes pour empêcher l’accès à un contenu si elles ont été saisies par une autorité judiciaire. Le deuxième cas est le fait, pour ces personnes physiques ou morales, de n’avoir pas procédé aux “diligences appropriées” dans l’hypothèse où elles ont été saisies par un tiers estimant qu’un contenu hébergé était illicite ou lui causait un préjudice. Bien évidemment, la jurisprudence devra préciser la définition de “diligence appropriée” et la détermination du délai permettant de considérer que le professionnel a agit “promptement” dans l’intérêt du tiers réclamant.

Les auteurs doivent être identifiables

Le deuxième élément intéressant est l’obligation pour les acteurs des services en ligne ou des prestations de stockage de conserver des données d’identification des personnes ayant contribué à la création d’un contenu. Ceci en vue de lutter contre l’hébergement de contenu dont l’auteur ne serait pas identifiable. Le législateur a aussi tenu à renforcer la liberté de ces auteurs de contenu en précisant que les données ne peuvent être utilisées à d’autres fins que pour “répondre à des demandes des autorités judiciaires”. Toute commercialisation des fichiers ainsi constitués nécessite tout de même la déclarations auprès de la Cnil par les professionnels visés. Troisième élément : la nécessité pour les individus assurant une activité d’édition en ligne de tenir à la disposition du public le nom des intervenants et la dénomination ou la raison sociale et le siège social de ces mêmes personnes morales. Une lisibilité et une traçabilité des producteurs et éditeurs de contenu doivent donc être assurées. Tous les citoyens sont concernés. Ainsi il est possible, à titre non professionnel, d’éditer un service de communication en ligne en restant anonyme aux yeux de l’internaute, étant précisé que doit être identifié le prestataire technique d’hébergement et sous la réserve expresse que ce dernier soit titulaire des éléments d’identification de l’éditeur du service. Cette innovation fait donc du prestataire technique un véritable “hébergeur de données” tenu de les communiquer. L’arrêt rendu par la Cour d’appel de Versailles le 8 juin 2000 (affaire Linda Heineman épouse Lacoste) avait donné lieu à une décision rendue par le tribunal de grande instance de Versailles le 8 décembre 1999.

Délimiter les responsabilités des différents acteurs Internet

La Cour a infirmé le jugement entrepris et a considéré qu’il n’était pas rapporté la preuve d’une négligence ou d’une imprudence commise par la société Multimania Production. En effet, dès qu’elle avait été avisée du caractère illégal de la diffusion des photographies en cause, elle avait pris ‘ toutes les mesures utiles pour faire identifier l’éditeur, pour fermer le compte (…) et empêcher la réouverture d’un site contenant lesdites photographies… ‘. La Cour a donc considéré que la société Multimania Production avait satisfait à l’obligation de faire cesser l’exploitation irrégulière du contenu du site litigieux. La réactivité qui est un mot clé d’Internet est donc un élément important dans l’appréciation des responsabilités des intervenants d’Internet. Restera donc à placer sur l’échelle du temps, cette notion de réactivité pour disposer des outils de mesure permettant de distinguer des responsabilités entre les acteurs du domaine.

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La rédaction