Après Google, Amazon : le gendarme de la concurrence, garant de la protection des consommateurs aux États-Unis, vient de déposer plainte contre la place de marché aux États-Unis. La « Federal Trade Chamber » (FTC) accuse la plateforme de pratiques anticoncurrentielles. Ces agissements auraient entraîné trois conséquences : une augmentation des prix pour les consommateurs, le blocage des concurrents, et une innovation réduite à néant. Cela faisait des mois que les rumeurs d’une telle action en justice circulaient, en particulier depuis que Lina Khan est aux rênes de la FTC. L’économiste américaine est connue pour avoir, quand elle était étudiante à Yale, publié un article qui explique comment le droit de la concurrence américain devrait être appliqué à Amazon.
Et cette fois, une plainte a bien été déposée au nom de la FTC et des 17 procureurs généraux d’États américains. Elle est étudiée par un juge fédéral de l’État de Washington, qui pourrait décider de condamner Amazon à des dommages-intérêts ou à des « mesures correctives structurelles » si la société est reconnue coupable – comprenez : le géant du e-commerce risque, théoriquement, un démantèlement.
1. Today @FTC and 17 state AGs filed a lawsuit detailing how Amazon uses punitive & coercive tactics to unlawfully maintain its monopolies. Amazon is exploiting its monopoly power to enrich itself while raising prices & degrading service for its customers.https://t.co/7NiPGxx2CU
— Lina Khan (@linakhanFTC) September 26, 2023
Quels sont les faits reprochés à Amazon ?
Amazon « utilise un ensemble de stratégies anticoncurrentielles et déloyales interdépendantes pour maintenir illégalement son monopole », écrit la FTC dans son communiqué de presse publié mardi 26 septembre. Concrètement, l’entreprise, en position dominante – ce qui n’a rien, en soi, d’illégal – aurait « empêché ses concurrents et les vendeurs de baisser leurs prix » en surfacturant ces derniers. Elle aurait « étouffé l’innovation et empêché les concurrents de rivaliser équitablement avec Amazon ». Ces mesures n’auraient pas permis à ses sociétés rivales de se développer et d’atteindre l’échelle nécessaire pour concurrencer la plateforme.
La FTC explique par exemple que l’entreprise identifie, via des systèmes automatisés, les vendeurs de sa place de marché qui proposent leurs produits à des prix inférieurs sur d’autres plateformes concurrentes. Pour les « punir » de ne pas proposer ces prix bas sur Amazon, elles les rendraient plus difficiles à trouver sur sa market place. En agissant de la sorte, le géant de Seatle empêcherait des plateformes concurrentes de pouvoir émerger et exister – puisque les vendeurs seraient contraints de proposer leurs prix les plus bas sur Amazon, et pas sur un autre site concurrent. Autre point de la plainte : son service de livraison Prime (rapide) ne serait proposé qu’aux vendeurs qui utilisent ses propres services de traitement des commandes – des services qui sont très coûteux. Amazon privilégierait aussi injustement ses propres produits par rapport à des produits similaires vendus par des détaillants.
Contrairement à la plainte précédente de juin dernier, dans laquelle la FTC a accusé la place de marché d’avoir piégé des millions de consommateurs, l’autorité se concentre cette fois sur les petites entreprises, qui auraient sensiblement souffert du comportement d’Amazon.
Sont notamment visés les frais imposés aux vendeurs de sa place de marché. L’entreprise aurait augmenté les frais de ces derniers d’environ 30 % entre 2020 et 2022. Selon la FTC, entre les frais demandés pour notamment être bien placés dans les moteurs de recherche ou pour l’exécution des commandes, Amazon prendrait près de la moitié de ce que les vendeurs gagnent sur leurs ventes. Un point de vue partagé par cette association américaine, Institute for Local Self-Reliance, selon laquelle Amazon empocherait « 45 cents de chaque dollar de vente, contre 19 cents en 2014 ».
Comment se défend Amazon ?
Dans un communiqué de presse, Amazon a expliqué que la plainte était erronée. « Si la FTC parvient à ses fins, il en résultera un choix réduit de produits, des prix plus élevés, des livraisons plus lentes pour les consommateurs et des options réduites pour les petites entreprises, ce qui va à l’encontre de l’objectif de la loi antitrust », estime l’entreprise.
La FTC veut mieux encadrer les Gafam
Depuis des mois, la FTC cherche à mieux réguler les géants du numérique. Outre Google et son procès historique, l’autorité de la concurrence américaine s’est attaquée à bon nombre d’entreprises du numérique, pour l’instant sans succès.
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Car contrairement à la Commission européenne, la FTC doit passer par des juges pour prononcer une amende ou une sanction. Et jusqu’à présent, les tribunaux ne la suivent pas. L’autorité a essuyé plusieurs défaites – comme lorsqu’elle a voulu bloquer l’acquisition d’Activision Blizzard par Microsoft ou empêcher Meta d’acheter la société de fitness en réalité virtuelle Within.
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Source : Communiqué de la FTC