Si la commercialisation de la 5G n’est pas attendue avant 2020, les opérateurs y travaillent depuis plusieurs années déjà. Parmi eux, Orange qui réalise actuellement des mesures de canal entre des émetteurs et des récepteurs sur des bandes de fréquence expérimentales à Belfort. Mais l’opérateur planche aussi sur un nouveau matériel et logiciel radio. Ses équipes de recherche ont notamment mis au point un type d’antenne 5G, dite « focalisante », qui pourrait être promis à un bel avenir.
Nous avons pu voir de près l’un des prototypes et assister à une démonstration du dispositif au cœur du nouvel écocampus de l’innovation Orange Gardens à Châtillon. C’est là que nous avons retrouvé Nicolas Demassieux, le Directeur de la recherche d’Orange et Dinh-Thuy Phan Huy, l’ingénieur en charge du projet.
Le trafic et les débits vont exploser avec la 5G
« La 5G, c’est la promesse d’un débit à 1 Gbt/s mais aussi d’une multiplication du trafic par 1000 sous l’effet de la généralisation des vidéo très haute définition et de l’arrivée de milliards d’objets connectés », attaque d’emblée Nicolas Demassieux. « Or, si l’on multiplie par 1000 l’énergie dépensée dans nos réseaux, on arrivera quasiment à une cinquantaine de centrales nucléaires », prévient-t-il. C’est là qu’entre en scène notre fameuse antenne 5G. « En théorie, avec 100 petits éléments rayonnants de ce type au niveau du réseau, on pourrait diviser par 100 la puissance émise pour un même débit offert », s’enthousiasme Dinh-Thuy Phan Huy qui dirige le projet cofinancé par Orange et l’ANFR (Agence Nationale de la Recherche).
En apparence, le matériel ne présente pourtant rien d’exceptionnel. « Nous avons utilisé une antenne du commerce. C’est notre carte électronique et le logiciel qui tourne dessus qui font la différence », prévient la jeune chercheuse en désignant son prototype sur table qui a été réalisé avec le concours de l’INSA à Rennes, de Thales, d’Atos, de Telecom Bretagne et de l’Institut Langevin.
Des antennes intelligentes pour se focaliser sur l’objet connecté
Pour nous faire comprendre l’intérêt de son soft, la jeune chercheuse nous désigne une dalle de 20 cases sur 20. Derrière chaque case, un capteur qui traduit en couleur le niveau de puissance de l’onde qui le traverse.
Voir la démonstration en vidéo :
Première expérimentation : montrer visuellement comment fonctionne le réseau aujourd’hui. Actuellement, une antenne émet des ondes radio dans toutes les directions, ce qui permet à tout le monde, quel que soit sa position, de rester connecté. Le problème, c’est que cela occasionne aussi une grande déperdition d’énergie se traduisant sur la dalle par une multitude de couleurs allant du bleu, au plus près de l’objet à connecter, jusqu’au rouge, très éloigné de la cible.
Pour comparaison, Dinh-Thuy Plan Huy passe ensuite à son prototype d’antenne 5G. Une antenne réceptrice représente le smartphone, tandis qu’un PC fait tourner le logiciel des antennes intelligentes. « On va utiliser un réseau d’antennes et lui faire apprendre à se focaliser sur un objet connecté et à mémoriser sa position », nous décrit l’ingénieur. Il n’y a alors plus que des cases bleues qui apparaissent. « Toutes les émissions superflues ont été supprimées. On établit un lien radio que là où on en a besoin », constate avec satisfaction notre chercheuse. Une performance qui aurait de nombreuses conséquences positives.
Vers des smartphones moins chers ?
« Il faut bien comprendre que quand il y a moins d’énergie, c’est aussi moins d’interférences pour les autres qui ne veulent pas recevoir votre signal mais le leur », souligne Nicolas Demassieux. Et comme cette technologie nécessite moins de dépense d’énergie, les terminaux seront moins chers à fabriquer que ceux de la 3G et de la 4G qui ont besoin d’être très puissants. « On va revenir à des récepteurs plus simples, aussi simples que ceux de la 2G. Ils feront baisser le prix des smartphones et pourront être embarqués sur davantage d’objets connectés », observe encore le directeur de la recherche d’Orange.
L’opérateur n’est pas le seul à batailler sur ce créneau. Mais il vient tout de même de gagner une longueur d’avance sur le terrain de la mobilité. Il est très difficile, en effet, de faire fonctionner une antenne focalisante avec un objet en mouvement. Prenons un véhicule connecté qui se déplace. Entre le moment où il envoie un ping au réseau et le moment où le réseau focalise, il a déjà changé de place donc la cible est ratée.
Pour résoudre ce problème, Dinh-Thuy Plan Huy et des institutions partenaires ont utilisé le procédé physique du retournement temporel établi dans les années 90 par Mathias Fink. Il consiste à forcer l’onde radio à rejouer le scénario de sa propagation mais à rebours et à se refocaliser sur le point d’émission. Pour cela, il faut insérer une antenne de prédiction à l’avant du véhicule afin d’envoyer un ping, et une autre à l’arrière pour recevoir le signal. « Nous sommes les seuls à avoir réussi à faire fonctionner ces innovations à 300 km/h », souligne Dinh-Thuy Plan Huy.
Reste maintenant à passer de la simulation aux véritables tests. Mais Orange espère bien imposer « sa technologie verte » comme standard des premières normes 5G.
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