Pendant des décennies, le concept d’écran pliant à appartenu à la science-fiction. Depuis quelques mois, cette technologie fait quelques timides pas dans la réalité grâce à des constructeurs comme Samsung ou Huawei qui essaient de créer le smartphone de demain. Un mobile capable de se transformer en un autre appareil, comme une tablette, tout en restant facile à transporter. Le dernier Galaxy Z Fold 2 en est le parfait exemple et repousse avec brio les frontières de la technologie mobile.
L’approche choisie par Motorola est différente. Plutôt que d’imaginer le futur, le constructeur s’amuse à jouer sur la nostalgie pour titiller les consommateurs. Son razr 5G, une petite évolution du premier razr de 2019, s’inspire, lui aussi, du design de l’emblématique téléphone à clapet sorti en 2004, lui-même membre de l’illustre famille « Razr ». Cohabitent alors deux styles que l’on pensait incompatibles, le rétro et l’ultra moderne. Peut-on créer un smartphone pliant performant en se fondant sur le passé ? Nous avons testé le Motorola razr 5G pendant une semaine.
razr : Un faux concurrent du Galaxy Z Flip
Tout d’abord, abordons la question de la concurrence. On oppose souvent le razr au Galaxy Z Flip de Samsung, généralement en se moquant de Motorola. Nous avons nous-même souvent comparé les deux appareils en pointant du doigt les caractéristiques largement inférieures du razr.
Après une semaine avec l’appareil et plus d’un mois avec celui du Coréen, nous pouvons désormais affirmer que cette comparaison est complètement infondée. Les deux appareils n’ont rien à voir, aussi bien d’un point de vue technique que dans le concept en lui-même. Là où Samsung a voulu concevoir un véritable appareil haut de gamme capable de se plier (et qui s’adresse donc aux plus geeks d’entre nous), Motorola a tout misé sur le design pliant et ne s’est pas vraiment préoccupé des caractéristiques de son appareil. La cible visée est plutôt une population aisée et sensible aux produits « fashion », mais peu technophile. Un affrontement entre les deux appareils n’a donc pas vraiment de sens, ces deux appareils ne se destinant pas au même marché. Les fans de nouvelles technologies devront se tourner vers le Galaxy Z Flip. Point.
Clic. Clac.
Durant nos quelques jours avec le smartphone, nous avons été surpris par le nombre de personnes qui nous ont posé des questions sur le razr 5G. Leur point commun ? L’appareil leur rappelle « un vieux téléphone ». Peu se souviennent de son nom, mais tous sont intrigués par ce drôle d’engin qui claque lorsqu’on le referme. On sent d’ailleurs que Motorola a particulièrement soigné cette expérience. Aucun smartphone pliant ne se plie ou se déplie aussi facilement que ce razr 5G. Il suffit de donner un léger coup avec le pouce pour l’ouvrir et de presser son dos avec l’index pour le refermer (on maîtrise rapidement ce geste). L’écran pivote très rapidement et la charnière fait un bruit identique à celui du vieux téléphone à clapet. Cette sensation est très plaisante. On adore aussi raccrocher avec cet appareil, on se croirait dans un film américain.
Tout ceci s’explique par la conception de l’écran pliant qu’a Motorola. Contrairement à ce que propose Samsung, l’écran OLED de 6,2 pouces du razr 5G, intégralement recouvert de plastique, épouse la courbure de la charnière de l’appareil. Ajouté à cela une conception ultra souple de l’écran, Motorola évite ainsi toute trace de pliure. En revanche, la dalle reflète énormément la lumière. Notre laboratoire a beau avoir mesuré une luminosité maximale très correcte de 569 cd/m², nous avons été régulièrement gênés à l’utilisation. Sous les rayons du soleil, on est rapidement aveuglé par les reflets du plastique.
En revanche, et c’est presque un carton rouge, cet écran pliant souffre d’un énorme défaut de conception. Lorsque nous ouvrons ou refermons l’écran, un vide apparaît au niveau de la charnière. Nous avons facilement pu y glisser un trombone pour tirer sur l’écran, avec le risque de l’arracher en y allant plus fort. Si un petit débris vient s’intercaler entre l’écran et la charnière et reste coincé à l’intérieur, le razr 5G risque la casse en quelques secondes. Tout ceci est d’autant plus regrettable que ce défaut de conception était déjà présent sur le premier razr et que Motorola a donc délibérément choisi de ne pas y remédier. Ce qui nous laisse penser que ce razr est plus une démonstration technologique qu’un appareil réellement abouti. On s’en doutait, on en a désormais le cœur net.
Des bordures d’écran un peu trop larges
De par sa taille, l’écran déplié du razr séduit les amoureux de petits smartphones que nous sommes. Malheureusement, ses bordures épaisses gâchent l’expérience. Motorola mélange le pliant de 2020 avec l’encoche de 2017 et les bordures de 2004, ce qui crée un appareil hybride pour le moins curieux et peu esthétique. On finit bien évidemment par s’y faire, mais il faut vraiment être très nostalgique pour apprécier totalement ce design. Le menton de l’appareil, qui reprend les codes de celui du téléphone à clapet d’antan, constitue une vraie gêne dès lors qu’on veut fermer une application d’un simple glissement de doigt sur l’écran, de bas en haut. Ce n’est pas très ergonomique.
Autre erreur de design selon nous, l’emplacement du capteur d’empreintes digitales n’a tout simplement aucun sens. Situé sur la partie inférieure du dos de l’appareil, il nécessite de tordre son index à chaque tentative de déverrouillage. C’est vraiment bête, d’autant plus que le premier razr de 2019 l’avait en façade. Au final, on préfère largement configurer la reconnaissance faciale 2D non sécurisée de l’appareil. C’est plus rapide. Enfin, les boutons d’allumage et de volume, extrêmement petits, ne sont pas faciles à contrôler.
Trouvons un bon côté à ce design, le razr est un smartphone pliant extrêmement fin (7,9 mm) et très léger (192 grammes).
Un écran Quick View étrangement convaincant
Là aussi, on peut parler d’une bonne surprise. L’écran de « couverture » du mobile, de 2,7 pouces, n’est pas aussi anecdotique que nous le pensions. À vrai dire, il est peut-être même l’atout principal de ce smartphone.
Sur cet écran « Quick View », on peut configurer un accès rapide à certaines applications. Toutes ne sont pas supportées mais on trouve par exemple Messages, YouTube ou Google Maps. On peut aussi forcer l’affichage de certaines applis incompatibles comme Instagram et les utiliser dans un format très réduit. Grâce à l’affichage d’un clavier virtuel de taille confortable, on peut répondre à ses messages sans ouvrir l’appareil. On évite ainsi de se perdre dans ses réseaux sociaux, en se contentant de l’essentiel. On répond, et on éteint l’appareil. Nous nous sommes pris au jeu et nous avons adoré cette expérience. Notre laboratoire a mesuré une luminosité de 453 cd/m2 pour cet écran, ce qui n’est pas beaucoup mais peut, la plupart du temps, suffire.
L’interface de l’écran Quick View est plutôt bien pensée. À gauche, on accède rapidement à l’appareil photo. Sur la vue principale, on consulte ses notifications. À droite, on a accès à ses applications favorites tandis qu’encore plus à droite, on peut afficher tous ses contacts proches pour rapidement les joindre. Malheureusement, les bugs logiciels viennent gâcher l’expérience. Il est par exemple impossible d’ajouter un contact et le menu raccourcis rapides (pour baisser la luminosité par exemple) apparaît souvent sans que vous ayez demandé quoi que ce soit… Ce n’est pas très sérieux. Il existe aussi des tâches qu’il est impossible de réaliser sur l’écran Quick View, comme le déverrouillage de sa carte SIM. En effet, il faut ouvrir l’appareil à chaque fois. Là-encore, on a l’impression que Motorola n’a pas terminé le travail.
Au final, quelle utilisation de l’appareil ?
À l’utilisation, nous nous sommes surpris à régulièrement alterner entre les deux écrans du razr. Le petit écran suffit pour lire l’heure, consulter ses notifications, y répondre ou rapidement changer de musique tandis que le grand écran sert à tout le reste. Le concept de Motorola nous a convaincus, dommage que l’appareil ait encore des airs de prototype. Un razr 3 ou 4 pourrait en tout cas devenir vraiment intéressant.
Des caractéristiques décevantes… et alors ?
Comme son nom l’indique, le Motorola razr 5G est compatible 5G (si, si). Le smartphone utilise le processeur milieu de gamme Snapdragon 765G de Qualcomm, ce qui peut surprendre au vu de son prix élevé. Nous pardonnons volontiers Motorola qui, au final, nous prouve qu’il est capable de faire des choix en sacrifiant ce qu’il juge non essentiel. La recharge sans-fil, la recharge rapide (on se contente de 15W), les haut-parleurs stéréo etc. ne sont pas au programme… et n’auraient dans doute, de toute façon, pas vraiment intéressé la cible du razr. Rappelons-le, Motorola vise un public qui lit Vogue, pas 01net.
Point plus négatif, la température. Si nos mesures en laboratoire n’ont rien relevé d’anormal pendant les tests (l’appareil grimpe tout de même à 42,2 degrés et bride son processeur en pleine utilisation), nous avons été assez perturbés à l’utilisation. En effet, la batterie de 2800 mAh du smartphone est située dans sa partie inférieure, ce qui crée un important déséquilibre entre les deux parties de l’appareil. La prise en main en sort tout d’abord confortée (puisque la partie basse pèse plus lourd), mais l’appareil est finalement très pénible à utiliser après plusieurs minutes d’affilée. Car si le haut reste froid, le bas chauffe beaucoup. On a assez rapidement envie de tout lâcher.
En photo, nous espérions mieux. Ce n’est pas tant la qualité du capteur de 48 Mpix de l’appareil qui nous dérange mais plutôt l’absence de deuxième ou troisième appareil photo. À l’heure où l’ultra grand-angle et le téléobjectif se démocratisent, comment peut-on se contenter d’un simple module caméra sur un tel produit de luxe. L’excuse du « lifestyle » n’a ici pas lieu d’être. Les personnes prêtes à dépenser 1600 euros pour avoir un smartphone chic en voyage aiment se prendre en photo.
Cliquez-ici pour consulter d’autres photos prises avec le Motorola razr 5G.
Comme vous le constatez, les photos prises avec le razr 5G ne sont ni exceptionnelles ni franchement mauvaises. De jour comme de nuit, l’appareil s’en sort convenablement (même si on manque souvent de netteté en basses lumières). Se limiter à un seul appareil photo réduit malheureusement bien trop la polyvalence, ce que nous déplorons. En revanche, élément positif dû à ce design hors norme, l’appareil photo de 48 Mpix du razr 5G est accessible même lorsque l’appareil est fermé. À vous les selfies carrés de bonne qualité (il est tout de même un peu difficile de déclencher la prise d’une photo via le bouton sur le côté et le déclenchement au geste n’est pas toujours efficace).
Enfin, saluons LA nouveauté majeure du razr 5G par rapport au razr 2019, la possibilité d’insérer une vraie carte SIM. Plus besoin de souscrire une offre opérateur compatible eSIM pour utiliser l’appareil.
Autonomie, une déception plus qu’une catastrophe
Terminons par un point presque positif : l’autonomie du Motorola razr 5G, sans être bonne, s’avère étrangement convenable. Avec une batterie de 2800 mAh, l’appareil partait bien moins équipé que la plupart des mobiles du moment (batteries de 4000 à 5000 mAh). Nous nous attendions à une catastrophe, Motorola a finalement réussi à limiter les dégâts.
L’appareil a résisté 12h11 à notre test d’autonomie polyvalente, ce qui est moyen sans être catastrophique comme sur le Pixel 4 de Google (9h05). On ne peut malheureusement pas en dire de même niveau streaming vidéo où les 7h42 obtenues par le smartphone ne lui ont permis de résister que que 4 minutes de plus que le Pixel 4, ce qui est donc le second pire résultat jamais enregistré par notre laboratoire. Enfin, au téléphone, on peut tenir 14h11 avec le razr 5G. Il s’agit ici aussi du pire résultat jamais mesuré toutes catégories confondues. On dépasse d’habitude facilement les 24 heures.
À l’utilisation, le razr 5G ne nous a pourtant pas semblé si mauvais. Il y a une raison à ce décalage entre nos tests labo et la réalité, l’écran Quick View. En effet, de nombreuses micro-tâches effectuées habituellement depuis l’écran principal ont été reporté sur le petit écran du razr, qui consomme moins. Toutes nos journées se sont tout de même achevées sous la barre des 20%.
Côté recharge, il faut 1h39 pour passer de 0 à 100%. Etant donné la petite capacité de la batterie de l’appareil, c’est assez décevant.
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