Nous avons titré l’un des chapitres de ce dossier : Filmer, c’est raconter une histoire. Pour être exact, il aurait fallu le titrer : Un film raconte une histoire. L’idéal, dans tous les cas, est bien entendu que la scénarisation et que le déroulé de la vidéo soient respectés lors de la prise de vue. Cela étant, dans la réalité, ça n’est pas toujours possible…Il y a deux raisons à cela. La première est que, lorsque l’on filme, il est difficile, surtout au début, d’imaginer le résultat. Ce point distingue très nettement la photo de la vidéo.En photo, dans l’idéal, on visualise dès la prise de vue ce que l’on obtiendra, et on est déçu lorsque cela n’est pas le cas. En vidéo, on est généralement tributaire du déroulé des événements et il est difficile de prévoir à l’avance comment va se terminer ce que l’on est en train de filmer. Exceptions classiques, les scènes de la vie sociale (le mariage en étant un exemple caricatural) dont le déroulé est prévisible dans ses moindres détails.La seconde est que, dans de très nombreux cas, il ne se passe pas grand-chose. C’est là qu’intervient le montage. Cette étape permet d’assurer une continuité dans la narration pour que l’ensemble forme une histoire cohérente, avec un début, un déroulé et une fin.
Faites un rapide état des lieux
Voici, à gauche, un parfait exemple de situation dans laquelle il ne se passe rien, avec un déroulé parfaitement linéaire, sans réel événement de début et de fin. Il s’agissait de filmer une inauguration. Un constructeur coréen de matériel audiovisuel et ménager (LG) a transformé un bar branché de la capitale en laverie high-tech où les clients peuvent venir laver leur linge tout un buvant un verre ou en essayant les écrans haute définition de la marque.La scène est totalement linéaire, il ne se passe rien de particulier. Filmée de façon linéaire, cette soirée va donner une vidéo longue, molle et manquant cruellement de rythme. La page de gauche décrit les différentes séquences filmées exactement dans l’ordre où elles ont été filmées.
Reconstruisez un déroulé
Une fois toutes les séquences numérisées et alignée dans le ‘ chutier ‘ du logiciel de montage (ce terme est expliqué page suivante), il faut les voir comme les pièces d’un jeu de construction, à partir desquelles nous allons reconstituer une séquence d’événements. Cette opération est assez systématique pour tout ce qui touche à la vidéo ou au film. Vous le savez sans doute déjà, les différentes scènes d’un film ne sont que très rarement tournées dans l’ordre dans lequel on les voit lors de la projection. Cette reconstruction de la vidéo lors du montage demande quelques précautions lors de la prise de vue.La première est un impératif de continuité. Si tous vos personnages se déplacent dans le même sens (par exemple, si vous avez filmé une fête et que, sur votre cassette, vous avez tous vos amis en train d’arriver chez vous et aucun sur le point de partir), vous allez avoir du mal à construire une histoire. Autre conséquence : alternez plans serrés et plans larges, de façon à pouvoir rythmer le montage. N’hésitez pas à filmer quelques éléments distincts qui pourront servir de plans de coupe (un plan de coupe est un plan que l’on intercale entre deux scènes pour effectuer une transition de l’une à l’autre). Dans notre exemple, il était compliqué de réaliser des gros plans de personnages, car l’absence de lumière a obligé à tourner avec un temps de pose très long, qui a pour conséquence un rendu légèrement flou des mouvements. Cela n’est pas gênant, au contraire, ça renforce la sensation de mouvement, mais c’est peu compatible avec un gros plan. Comme nous allons le voir, le récipient contenant la lessive pourra servir de plan de coupe.
Ajustez en fonction de la durée souhaitée
En règle générale, il faut toujours tourner un temps plus long que la durée que l’on a prévue pour la vidéo montée. Cette règle a deux conséquences. La première, c’est qu’il est préférable d’avoir une idée, avant de tourner, de la longueur de son film. Ce n’est certes pas toujours possible : si vous filmez une réunion entre amis, vous n’allez pas planifier au départ la durée de la vidéo finale. Néanmoins, lorsque c’est possible, essayez de penser à cette donnée. La seconde conséquence est que plus vous tournerez de plans variés, plus vous aurez de chances d’obtenir un résultat dynamique et agréable et surtout vous aurez davantage de latitude pour jouer sur la durée de votre film.Dans notre exemple, le film est très court : la vidéo est destinée à ressembler à une sorte de carte postale animée, courte, d’une quarantaine de secondes. Dans ce très bref laps de temps, il faut donc mettre en place un début, un déroulé donnant une bonne idée de ce qui se passe et une fin.
Procédez au montage
Pour commencer, nous avons gardé les deux premières séquences en les raccourcissant beaucoup. Dans l’ordre, donc : une vue extérieure du lieu (en utilisant un passage où un piéton se dirige vers le lieu, pour donner une sensation de mouvement), puis la vue de l’enseigne. Ensuite, vient une séquence en intérieur qui a été sélectionnée pour le mouvement accompli par un des personnages, assis de profil. C’est un truc à retenir, lorsque vous réalisez un montage avec des séquences assemblées sans transition : si chacune commence par un mouvement, l’ensemble aura une meilleure dynamique.La condition est naturellement que le sens de ces mouvements ne soit pas contraire. Dans notre exemple, le premier mouvement est de l’arrière vers l’avant (on suit le piéton qui se dirige vers la porte), puis vers le haut (on lève la tête pour voir l’enseigne) et, enfin, notre personnage fait un mouvement de la gauche vers la droite. Le tout s’enchaîne naturellement.La circulation des mouvements qui accompagnent celle du regard du spectateur doit toujours être naturelle et fluide (sauf à devoir faire un effet spécial). Deux autres plans ont été conservés : en pratique, deux petits travellings verticaux. Le premier part d’une machine à laver et monte jusqu’à un personnage qui traverse l’écran, flou. Le second part de deux jeunes femmes qui discutent pour redescendre vers des machines. Entre les deux, le plan sur le pot de lessive sert de plan de coupe. Reste la question de la fin. Tel quel, notre montage se tient, mais se termine en queue de poisson. On récupère la troisième séquence filmée lors de l’entrée, celle qui représente un personnage sortant du local. Elle fera une fin parfaite.Le montage final répond à nos attentes et impératifs : il comporte un début et une fin et donne la sensation de présenter ce qui est perçu comme le déroulement de la soirée, alors qu’en pratique, il ne s’agit que de quelques extraits montés bout à bout.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.