L’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) vient d’adresser une lettre au siège européen de Twitter à Dublin, rapporte l’AFP. Le régulateur, qui cumule les fonctions autrefois attribuées au CSA et à Hadopi, se dit inquiet de la réduction d’effectifs décrétée par Elon Musk, nouveau patron de Twitter.
« Twitter est l’une des plates-formes les plus utilisées en France. De ce fait, elle soulève des questions d’ordre systémique en matière de sincérité du débat démocratique et de protection du public », déclare l’Arcom.
Après avoir pris le contrôle du réseau social, le milliardaire a licencié la moitié des employés de Twitter, « soit 3 700 personnes ». Par la suite, Elon Musk a imposé de nouvelles conditions de travail aux employés restants, poussant des centaines de salariés à la démission. Lors de cette vague de départs, Damien Viel, directeur général de Twitter France, a quitté ses fonctions.
C’est fini 🫡 Fierté, honneur et mission accomplie. Au revoir #twitterfrance 🇫🇷. Quelle aventure ! Quelle equipe ! Quelles rencontres ! Merci à tous pour ces 7 années incroyables et intenses💙. #workhardplayhard #OCaptainMyCaptain #LoveWhereYouWorked
— damien viel (@damienviel) November 20, 2022
La modération de Twitter inquiète
La lettre de l’Arcom souligne que Twitter s’est également séparé de 75 % de ses prestataires. D’après les informations de Protocol, il s’agit essentiellement de modérateurs. L’an dernier, Twitter péchait déjà par la frugalité de son service de modération.
L’entité rappelle que Twitter affirmait disposer de 1867 personnes dédiées à « l’application de sa politique et à la modération des contenus », ce qui représentait « plus d’un tiers » de ses « effectifs mondiaux » l’année dernière. Au terme des licenciements, il devrait rester moins de 1000 modérateurs dans les rangs de Twitter. Dans ce contexte, Roch-Olivier Maistre, l’actuel président de l’Arcom, doute de « la capacité de Twitter à maintenir un environnement sûr » pour les internautes.
Suite aux réductions d’effectifs, l’Arcom se demande si Twitter est toujours en mesure de modérer efficacement les contenus qui enfreignent la loi. Il s’agit d’une inquiétude partagée par les annonceurs publicitaires, qui représentent 90 % des revenus du groupe. Ceux-ci craignent que les coupes budgétaires et l’idéologie affichée par Elon Musk ne provoquent une explosion des contenus haineux en ligne.
Plusieurs marques ont d’ailleurs annoncé la suspension de leurs dépenses publicitaires sur la plate-forme. C’est le cas de General Mills, le 6e groupe alimentaire mondial, de General Motors, du mastodonte Mondelez international, de Pfizer et d’Audi (Volkswagen). De son côté, GroupM, l’agence média numéro 1 au monde, assure que Twitter est devenu « hautement risqué » pour les annonceurs :
« Cette décision a été prise après les nouvelles démissions de cadres dirigeants à des postes clés, les usurpations d’identité de grandes marques sur la plate-forme et les risques que Twitter ne puisse plus répondre à ses obligations réglementaires ».
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L’Arcom met la pression à Twitter
La lettre de l’Arcom vise surtout à rappeler à Twitter ses obligations légales. Le gendarme du net évoque notamment la Loi contre la manipulation de l’information de 2018. Cette législation oblige les réseaux sociaux à mettre en place « un dispositif facilement accessible et visible permettant aux internautes de signaler de fausses informations ». Une combinaison d’algorithmes et de modérateurs humains doivent par la suite examiner ces signalements. Les plates-formes sont périodiquement enjointes à faire un rapport au sujet des moyens déployés contre les fake news auprès de l’Arcom.
Enfin, le régulateur français exige que Twitter confirme officiellement être capable de faire face à ses obligations légales d’ici au jeudi 24 novembre 2022. Le réseau social est encouragé à détailler « les moyens humains et technologiques consacrés au respect de ces obligations », y compris à « la modération des contenus et pratiques illicites ».
Le régulateur rappelle également à Twitter que le Digital Services Act (DSA), la loi européenne sur les services numériques, vient d’entrer en vigueur. Cette législation donne de nouvelles responsabilités aux réseaux sociaux en matière de transparence et de protection des utilisateurs. En miroir de ses concurrents, Twitter a jusqu’à l’été 2023 pour se plier aux dispositions du DSA.
Si le réseau social d’Elon Musk n’y parvenait pas, la Commission européenne pourrait lui infliger une amende pouvant aller jusqu’à 6 % du chiffre d’affaires global. L’an dernier, Twitter a enregistré un chiffre d’affaires de 5,08 milliards de dollars. En cas d’infractions graves à répétition, la Commission se réserve le droit de prononcer l’interdiction d’une plate-forme au sein de l’Union européenne. Le réseau social n’a pas encore réagi aux inquiétudes formulées par le régulateur.
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Au delà des problèmes de régulation, comment Twitter peut-il encore fonctionner aujourd’hui avec la moitié de ses employés et un tiers de ses prestataires ?