Pour la quatrième fois, TikTok fait l’objet d’un projet de loi aux États-Unis qui vise à interdire le réseau social chinois, à moins qu’il ne soit cédé à des fonds américains. Et pour la quatrième fois, la plateforme compte bien se défendre bec et ongle contre ce qu’elle estime être une expropriation… et une violation de la liberté d’expression. Car cette fois, le texte pourrait bel et bien aller jusqu’au bout de sa procédure d’adoption outre Atlantique.
Adopté samedi 20 avril à une très large majorité par la chambre des représentants, le texte est désormais sur les bancs du Sénat américain, rapporte The Verge, le samedi 20 avril. S’il est adopté, ByteDance, la maison mère chinoise de TikTok, serait contrainte de vendre ses parts à des fonds américains d’ici un an, sous peine de voir le réseau social supprimé des magasins d’applications des smartphones. Une alternative que l’entreprise compte combattre devant les tribunaux, comme elle l’a déjà fait précédemment.
Le réseau social chinois est outre Atlantique soupçonné d’être un « cheval de Troie du parti communiste chinois ». La plateforme serait, selon ses détracteurs, un moyen de collecter des informations ou d’influencer le débat ou les consciences outre-Atlantique, dans un contexte de compétition ou de guerre froide technologique entre la Chine et les États-Unis. TikTok est aussi accusé d’avoir un effet nocif sur la santé mentale des jeunes adultes, comme d’autres réseaux sociaux.
À lire aussi : Pas de réseau social avant 17 ans : aux États-Unis, le ton se durcit contre les plateformes
« Un risque pour la sécurité nationale » des États-Unis ?
Ces accusations ont été réitérées dimanche 21 avril par le sénateur démocrate Mark Warner, président de la commission sénatoriale du Renseignement. Interrogé par CBS News, l’homme politique américain a expliqué que TikTok pourrait être utilisé comme outil de propagande par le gouvernement chinois, en particulier au vu « des nombreux jeunes » qui utilisent TikTok pour s’informer. « L’idée de donner au Parti communiste un tel outil de propagande ainsi que la possibilité de récupérer les données personnelles de 170 millions d’Américains constitue un risque pour la sécurité nationale », avance-t-il à nos confrères.
À lire aussi : TikTok bientôt interdit ? On vous explique comment on en est arrivé là
Depuis les premières accusations – toujours vivement réfutées par la plateforme – qui ont commencé sous le mandat de Donald Trump, l’entreprise a mis en place une flopée de mesures destinée à rassurer Washington, et à mettre fin à tout soupçon d’ingérence de la Chine. Son projet « Texas » a consisté par exemple à isoler les données des utilisateurs américains, en les stockant uniquement sur des serveurs localisés à Austin, au Texas. Mais cette coupure avec la Chine, qui ne serait pour une partie que cosmétique, selon des enquêtes du New York Times et Fortune, n’a jamais convaincu les législateurs américains.
À lire aussi : TikTok : les liens avec la maison mère chinoise ne seraient pas totalement coupés, selon des ex-employés
Un projet qui violerait la liberté d’expression, selon TikTok
En mars dernier, ces derniers avaient adopté, après deux autres tentatives, dont une par l’État du Montana, un troisième projet de loi qui visait à interdire TikTok. Le texte n’était cependant jamais allé au bout du processus législatif. En sera-t-il de même pour cette quatrième « tentative » d’interdiction ? Pas sûr car cette fois, la mesure obligeant TikTok à être cédé ou à quitter le sol américain a été insérée dans une proposition de loi relative à un programme d’aide à l’étranger (dont l’Ukraine). Or, cette proposition devrait être étudiée par le Sénat américain dans les prochains jours, ce qui obligerait la chambre haute du Congrès à se prononcer sur TikTok très prochainement.
Si elle est votée, ByteDance, la maison mère de la plateforme chinoise, aurait douze mois pour céder ses parts dans TikTok : en cas négatif, la plateforme serait exclue des magasins d’applications des smartphones américains. Le président Joe Biden a déjà déclaré qu’il signerait cette loi, dès qu’elle serait adoptée par le Sénat. Et le réseau social, utilisé par près d’un Américain sur deux, compte bien se battre contre cette nouvelle menace. Et pour ce faire, il invoquera, comme il l’a déjà fait, une violation de la liberté d’expression.
Dans un communiqué du dimanche 21 avril dont Reuters se fait l’écho, TikTok a ainsi déclaré qu’il était « regrettable que la Chambre des représentants utilise la couverture d’une importante aide étrangère et humanitaire pour adopter une fois de plus un projet de loi d’interdiction qui bafouerait les droits à la liberté d’expression de 170 millions d’Américains ». En interne, Michael Beckerman, le responsable de la politique publique de TikTok outre Atlantique, a écrit aux salariés que le projet de loi était inconstitutionnel. Il a ajouté que TikTok le combattrait devant les tribunaux, selon un mémo consulté par le média américain The Information.
À lire aussi : Trop coûteux, trop complexe… Pourquoi TikTok ne serait pas près d’être interdit ou vendu aux États-Unis
« Nous irons devant les tribunaux pour le contester »
« Dès que le projet de loi sera signé, nous irons devant les tribunaux pour le contester », a expliqué le responsable de la politique publique dans son message interne. « Nous continuerons à nous battre, car cette loi est une violation claire des droits du premier amendement des 170 millions d’Américains qui utilisent TikTok », a-t-il poursuivi.
Cet argument est aussi défendu par des associations comme l’Electronic Frontier Foundation : pour cette dernière, interdire TikTok reviendrait à étouffer la liberté d’expression des Américains, en plus de créer un précédent dangereux. C’est sur ce fondement qu’un juge du Montana avait bloqué, l’année dernière, un projet de loi similaire, qui interdisait le réseau social dans l’État américain. Reste à savoir si cet argument convaincra aussi le juge fédéral, si le texte est bien voté par le Sénat américain, et s’il est attaqué en justice par TikTok.
🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.