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Comment Huawei va mettre l’intelligence artificielle au cœur de ses prochains smartphones

La prochaine puce mobile du chinois inclut une unité dédiée à l’intelligence artificielle des applications. Si le constructeur est le premier à présenter cette innovation, dans son prochain Mate 10, la concurrence risque de suivre très rapidement.

Déplacer l’intelligence artificielle du cloud vers les smartphones. Voilà ce que Huawei tente de réaliser avec son processeur Kirin 970 présenté le samedi 2 septembre à l’occasion de l’IFA de Berlin. C’est celui-là même qui équipera son prochain Mate 10 annoncé le 16 octobre prochain.

« Jusqu’à présent, l’intelligence artificielle était prise en charge dans le cloud. C’est-à-dire que le smartphone envoie les informations sur des serveurs, elle y est traitée puis renvoyée sur l’appareil. C’est notamment le modèle des assistants vocaux ou de certains services de traitement d’images », explique Christophe Coutelle. Ce Français est le vice-président du marketing logiciel de la branche grand public de Huawei, il est notamment en charge de la surcouche maison baptisée EMUI.

Privilégier la puce plutôt que le cloud

« L’idée est d’embarquer cette intelligence artificielle dans le smartphone. Cela permet de ne plus avoir de dépendance au réseau, d’éliminer la latence et de garantir une meilleure protection des données personnelles », détaille le responsable. Sans transiter par un réseau et sans être stockée sur des serveurs, ces dernières sont en effet moins susceptibles d’être interceptées ou dérobées. « Une telle approche demande beaucoup de capacité de traitement, ce qui est en général nuisible à la batterie, d’où notre choix d’inclure dans le Kirin 970 une unité de traitement neuronal (NPU) dédiée ».

Gravée en 10 nm, la puce de 1 cm/² contient 5,5 milliards de transistors.

Plutôt que de demander aux cœurs du processeur ou à l’unité graphique de se charger de ces tâches, c’est le NPU qui s’en occupera désormais. Avec à la clé un gain important en matière de consommation énergétique. Auparavant, le traitement des tags de 1 000 photos était effectué sur les smartphone Huawei uniquement la nuit, si l’appareil était branché au secteur. Ce processus reconnaît par exemple les sujets qui figurent sur les clichés (chien, montagne, enfant, etc.) et permet ensuite d’effectuer une recherche pour les retrouver facilement. Avec le Kirin 970, Huawei promet que cela ne consommera désormais que 0,19 % de la capacité totale d’une batterie classique de smartphone.

Des améliorations pas réservées seulement à Huawei

La société compte évidemment s’ouvrir à d’autres éditeurs pour que les capacités du Kirin 970 soient exploitables par le plus grand nombre. « Tout d’abord, n’importe quel développeur aura accès directement à notre neural network API (NNAPI), pour utiliser directement notre NPU au sein de ses applications, puis les distribuer ensuite sur le Play Store », rassure Christophe Coutelle.

« Mais nous avons fait en sorte que notre NPU soit accessible par d’autres couches logicielles. C’est par exemple le cas avec TensorFlow Lite et Caffe2Go, les deux frameworks des intelligences artificielles de Google et Facebook. Les développeurs pourront alors y faire appel directement, puis ce sont eux qui auront à leur tour accéder à notre NNAPI », détaille Christophe Coutelle. L’initiative de Huawei ne sera donc a priori pas isolée sur sa propre interface et quelques applications de partenaires.

Une longueur d’avance pour Huawei

Dans les faits, le NPU permettra par exemple à l’application appareil photo de reconnaître instantanément une scène et d’y appliquer le réglage correspondant. Même chose pour le traitement d’image à la façon de l’application Prisma. Celle-ci applique aux photos des filtres inspirés des styles de peintres reconnus (Mondrian, van Gogh, etc.). Mais pour cela, l’application envoie la photo sur ses serveurs avant de la restituer sur le smartphone. Avec son NPU, Huawei promet que l’on pourra obtenir un aperçu en temps réel de ce genre de filtres sur ses photos.

Avec ce nouveau processeur Kirin 970 gravé en 10 nm, Huawei apporte de l’eau au moulin de cette tendance forte qui traverse toute l’industrie. Google n’a pas dit autre chose en annonçant Tensorflow Lite lors de la dernière Google I/O. Apple a ouvert tout grand les portes de l’apprentissage machine aux développeurs de son écosystème en mettant à disposition son API CoreML.
Néanmoins, Huawei est le premier fabricant de smartphone, à ajouter une unité de calcul neuronale directement dans son processeur. Il n’est cependant pas le seul à y avoir pensé. ARM annonçait en mars dernier sa technologie DynamIQ, qui ne fera rien d’autre que ce que vient d’annoncer Huawei.

Le géant chinois a donc une très courte avance, une forme d’exclusivité qu’il ne conservera pas longtemps. On sait que Samsung travaille déjà à un équivalent pour ses prochaines puces Exynos, tandis qu’Apple pourrait emboîter le pas du chinois dès la semaine prochaine, lors de la présentation le 12 septembre du nouvel iPhone et sa puce A11. L’enjeu de l’intelligence artificielle devient désormais palpable, au cœur de nos smartphones, et les puces dédiées sont la prochaine étape obligée. Huawei a ouvert la voie.

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Jean-Sébastien Zanchi